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L'Union européenne, porte–parole d'ATTAC?

Nous apprenons que « plusieurs dizaines d'associations altermondialistes (dont ATTAC et la Ligue des droits de l'homme) et syndicats (CGT, G 1O, FSU, CFTC, FGTE–CFDT) redoutant la perspective d'une ouverture à la concurrence de l'ensemble des services publics, regroupés en collectif, viennent de demander au président Jacques Chirac de "réviser" le mandat donné au commissaire européen Pascal Lamy, afin qu'il propose un "moratoire" sur l'accord général sur le commerce des services (AGCS) en négociation à l'OMC » (AFP, 3 juillet) .
La vice–présidente d'ATTAC, Susan George, a précisé : « Il y a une boulimie dans l'action de l'OMC », déplorant, selon l'AFP, que l'OMC voie « dans les services, l'eau, la santé et l'éducation de gigantesques sources de profit ».
Et lors d'une conférence de presse, Pierre Barge, membre du collectif, a déploré que « l'AGCS, en négociation &` l'Organisation mondiale du commerce (OMC), menace de livrer au marché et à la concurrence l'ensemble des services publics ». Il s'agirait donc, pour ce collectif et pour ATTAC, de « réviser» le mandat du commissaire européen Lamy pour défendre les services publics?
LE COMMISSAIRE EUROPÉEN PEUT–IL VRAIMENT AVOIR UN MANDAT CONTRADICTOIRE AUX EXIGENCES DE L'OMC ?
Mais la Commission européenne, qui dicte, directive après directive, la privatisation de tous les services publics, vient de publier un Livre vert sur ce qu'elle appelle les services d'intérêt général (SIG).
Que dit ce Livre vert? « Les termes service d'intérêt général et service d'intérêt économique général ne doivent pas &ecicr;tre confondus avec l'expression "service public" (…), qui n'est pas utilisée dans le présent Livre vert. » Et pourquoi cette disparition du nom de service public au profit des SIG? Car, contrairement au service public, « le fait que les fournisseurs de services d'intérêt général soient publics ou privés n'a pas d'importance dans le droit communautaire (…). Les entreprises publiques confient de plus en plus souvent la fourniture de ces services à des entreprises publiques ou privées, ou à des partenariats entre le secteur public et le secteur privé. »
Et que recouvrent ces SIG, qui peuvent donc être privés? Le Livre vert répond : « La réalité des services d'intérêt général couvre un large éventail d'activités de types différents, de certaines activités des grandes industries de réseau (énergie, services postaux, transport et télécommunications) à la santé, l'éducation et les services sociaux », donc… tout ce que l'OMC se fixe de « livrer au marché et à la concurrence ».
Dès lors, comment comprendre la requête de ce collectif et d'ATTAC ?
L'Union européenne et son commissaire Lamy pourraient avoir un « mandat » contradictoire à l'OMC ?
Qui peut sérieusement le croire?
DANIEL SHAPIRA     (semaine du 9 au 15 juillet 2003 – n°597)

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De l'Union européenne … à SUD – PTT

… EN PASSANT PAR LA CONFÉDÉRATION EUROPÉENNE DES SYNDICATS ET ATTAC

DÉBAT
D'où viennent, que sont ces « services d'intérêt général », dont on constate une fois de plus, à la lecture du dossier sur la transformation de La Poste, qu'ils sont une machine de guerre contre les services publics? C'est l'Union européenne qui en organise actuellement la mise en place, avec l'objectif publiquement affirmé de privatiser les services publics, de les transformer en instruments de profit financier, dont le fonctionnement n'aurait plus rien à voir avec le monopole public qui garantit en droit l'égalité des citoyens devant l'accès aux besoins auxquels ils répondent.
Cette offensive brutale, les dirigeants de Bruxelles n'auraient pas seuls la force de la mener à son terme s'ils ne s'appuyaient sur la collaboration étroite de la Confédération européenne des syndicats. Celle–ci se plie à toutes les injonctions officielles découlant du traité de Maastricht et présente « l'ouverture à la concurrence » comme une « nécessité ».
C'est directement la main dans la main avec le patronat européen des entreprises publiques, le CEEP, que la CES a élaboré un « projet de directive–cadre », qui prévoit textuellement que les entreprises privées pourront être des opérateurs des SIG, dont l'objectif est de détruire les services publics.
S'il est un homme qui ne peut ignorer ni ces réalités ni leurs conséquences concrètes immédiates pour tous les travailleurs de la corporation postale – et les usagers du service public qu'est toujours La Poste en France –, c'est certainement Pierre Khalfa.
Dirigeant de SUD–PTT à FranceTélécom, il ne peut pas ne pas savoir que des milliers d'agents ont perdu leur statut de fonctionnaires lors de la privatisation de l'ancien opérateur public des télécommunications, que c'est tout l'ensemble de leurs acquis sociaux qui y est systématiquement dégradé.
Pierre Khalfa est aussi un dirigeant d'ATTAC et il a écrit en janvier 2001 un document préparatoire à la discussion du « conseil scientifique » de cette organisation, intitulé : « Services publics, quel avenir? » Il y estime qu' « il paraît difficile de revenir sur les ouvertures à la concurrence qui ont déjà été effectuées. »
Faut–il donc accepter les dénationalisations, les privatisations déjà engagées, avec toutes les remises en cause des acquis sociaux qu'elles signifient? Il conclut ce document en évoquant la nécessité d'« une réforme des traités européens », c'est–à–dire qu'il refuse de remettre en cause le cadre de l'Union européenne et des traités de Maastricht et d'Amsterdam, d'où vient toute la politique de destruction des services publics.
Il propose un « moratoire sur les déréglementations et les privatisations », c'est–à–dire leur simple suspension et non leur annulation.
Dans ce texte, dont nous pouvons éventuellement fournir copie intégrale à ceux de nos lecteurs qui le souhaiteraient, Khalfa ne s'oppose nullement au projet de mise en place des SIG et se satisfait même que l'article 16 du traité d'Amsterdam « reconnaisse leur rôle ».
Il estime qu'il est possible d'y « construire un espace de débat démocratique, afin que les usagers–citoyens puissent peser sur les options possibles ». Il regrette qu'« un bilan sérieux » n'ait pas encore été fait de ce qui s'est passé à FranceTélécom.
La réalité désastreuse – que Pierre Khalfa ne peut pas ne pas connaître jusque dans les moindres détails, répétons–le – n'est–elle pas un bilan à ses yeux ?
L'agression généralisée contre les travailleurs de La Poste, que prépare son président sur ordre du gouvernement français et de la Commission de Bruxelles, relève–t–elle de ce qui se discute courtoisement dans les salons des forums sociaux ou appelle–t–elle que tout – c'est–à–dire la mobilisation dans l'unité – soit mis en œuvre pour l'interdire?
Ce débat ne peut être esquivé.
FRANÇOIS PÉRICARD     (semaine du 16 au 22 juillet 2003 – n°598)

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L'Union européenne, "filet de sécurité" contre la mondialisation capitaliste?

C'est du moins ce qu'a suggéré Bernard Cassen, directeur général du Monde diplomatique et président d'honneur d'ATTAC, dans un débat avec André Fourçans, professeur d'économie (France Culture, le 20 juillet dernier). Le thème du débat : la préparation du prochain sommet de l'Organisation mondiale du commerce à Cancun, le libre–échange, méfaits ou bienfaits.
Interrogé sur ce que signifie « l'altermondialisation » dont se réclame ATTAC, Bernard Cassen a d'abord expliqué : « Ceux qu'on appelle altermondialistes ne sont pas du tout opposés aux échanges, mais ils hiérarchisent les échanges. Il y a des échanges qui sont importants, qui sont les échanges d'idées, d'hommes et de femmes, de chercheurs, de savants, de théologiens, de poètes, c'est cela les véritables échanges. Et puis il y a le degré zéro des échanges, les échanges de biens et de services, qui ne contribuent absolument en rien à la paix, à la connaissance entre les peuples. »
Un théologien plus nécessaire qu'un tracteur? Étrange monde que celui de Bernard Cassen… qui ne doit toutefois pas considérer comme « degré zéro des échanges » le versement de son salaire.
Mais ne soyons pas tatillons et reconnaissons que Bernard Cassen s'est également prononcé, dans ce débat, pour l'annulation de la dette des pays pauvres – c'est d'ailleurs un point d'accord avec A. Fourçans. Dont acte, mais ces deux « spécialistes de la mondialisation » se gardent bien de poser la question : comment imposer l'annulation de la dette? Il est vrai qu'ils évitent aussi soigneusement une autre question : qui est propriétaire « des biens et des services », leur « divergence » ne portant que sur la réglementation ou non du libre–échange?
Et c'est là que Bernard Cassen cite en exemple l'Union européenne : « Je vais vous donner un exemple très simple, qui est celui de l'Union européenne, dont pourtant nous sommes assez critiques à bien des égards. Le marché intérieur européen a une sorte de filet de sécurité. C'est une zone de libre échange, l'Union européenne. Mais il y a au sein de l'Union européenne ce qu'on appelle des fonds structurels, qui représentent un tiers du budget communautaire. (…) Ces fonds structurels visent à aider les régions, et dans certains cas les pays. »
Donc, si l'on comprend bien, M. Cassen est à la fois contre « l'ultralibéralisme », le libre–échange sans contraintes, et pour le libre–échange au sein de l'Union européenne, qui serait un exemple de « bonne » réglementation… Fumiste!
L'Union européenne, ses directives chargées d'imposer aux travailleurs l'abaissement du coût du travail exigé par le FMI, le talon de fer de l'impérialisme, ses fonds structurels dédiés à l'éclatement des nations en « régions européennes » pour détruire tous les droits et garanties… c'est pour ATTAC le « filet de sécurité » contre la « mondialisation libérale ».
Voilà qui contribue à éclairer les objectifs du Forum social européen de novembre prochain Forum au financement duquel l'Union européenne contribue évidemment.
E.N.    (semaine du 30 juillet au 5 août 2003 – n°600)

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