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Après le Forum social mondial de Porto Alegre (25-30 janvier 2001)

Dans notre précédent numéro, à la veille du Forum social mondial de Porto Alegre, nous portions une appréciation sur ce forum, qu'on nous présentait comme l' "émergence d'un nouvel internationalisme", et sur ATTAC, son principal organisateur. Nous dénoncions ce "sommet" bénéficiant des faveurs de l'ONU et de la Banque mondiale, où « les organisations syndicales (étaient) conviées à participer - comme composantes parmi d'autres de la "société civile" - à l'élaboration de "propositions" incluant la "dimension sociale" des politiques d'ajustement structurel ». Le but d'une telle entreprise, expliquions-nous, était, au nom de l' "humanisation de la mondialisation", d'intégrer les organisations ouvrières indépendantes, et donc de remettre en cause leur existence elle-même.
"N'y allez-vous pas quand même un peu fort ?", nous dit-on parfois. Au regard des faits, nous ne le pensons pas. Mais c'est évidemment le droit de tout travailleur et de tout militant qui s'intéresse à notre courant d'exiger que nous prouvions par les faits - et même plutôt deux fois qu'une - les opinions que nous portons sur la situation et sur les actes des autres partis et groupements politiques.
Le Forum social mondial s'est tenu du 25 au 30 janvier 2001 sous les projecteurs médiatiques, couvert par un véritable feu d'artifice de louanges planétaires, avec, comme "symbole fort", le "grand débat vidéo" reliant Davos (le forum économique) à Porto Alegre (le forum social). Ses conclusions sont connues. Nous allons donc les examiner et montrer combien elles justifient le jugement que nous avons porté et, en conséquence, notre appel à combattre cette entreprise réactionnaire et à se regrouper sur le terrain de l'indépendance de classe pour la défense des organisations ouvrières indépendantes et des droits ouvriers.
"NOUS NE SOMMES PAS CONTRE LA GLOBALISATION..." (Bernard Cassen président d'ATTAC)
Officiellement, il n'y a pas eu de déclaration finale du Forum de Porto Alegre. Plusieurs textes ont été néanmoins adoptés. L'un de ces textes est intitulé : "Appel de Porto Alegre pour les prochaines mobilisations." Il invite à rejeter" les politiques néolibérales de l'actuelle globalisation ".
Les mots sont parfaitement pesés : "politiques néolibérales", "actuelle globalisation ". Porte-parole d'ATTAC, M. Cassen, rédacteur en chef du Monde diplomatique, s'en est expliqué à plusieurs reprises en se défendant d'être contre la globalisation :
"Nous sommes contre la globalisation telle qu'elle se fait aujourd'hui. "
Président du conseil scientifique d'ATTAC, René Passet, professeur d'économie politique à Paris-1, est même l'auteur d'un livre qui porte comme sous-titre "L'éloge de la mondialisation". A l'émission "Rue des entrepreneurs", le 27 janvier, sur France Inter, il revendiquait pleinement ce sous-titre en déclarant :
"On nous présente souvent comme des antimondialisation ; je ne le supporte plus. "
S'adressant au méga-spéculateur George Soros et aux autres représentants des multinationales présentes à Davos, M. Cassen les enjoignait
"à redescendre sur terre. Êtes-vous prêts à vous placer non plus du point de vue de la finance et des multinationales, mais du point de vue des sociétés, nous vous demandons simplement de revenir avec nous, dans la société, et non pas de continuer à voir la société comme une ressource pour vous, pour vos spéculations, pour vos profits. "
Tous frères en Jésus-Christ au sein de "l'autre mondialisation" ! Le milliardaire spéculateur et le gosse du Bangladesh condamné à travailler dès l'âge de 6 ou 7 ans pour trois fois rien, mais trois fois rien sans lesquels sa famille entière serait condamnée à mourir. Tous frères en l"'autre mondialisation" ! M. Jean-Marie Messier, P-DG de Vivendi Universal qui déclarait à Davos : "Si je suis invité l'an prochain à Porto Alegre, j'irai certainement" -, et les milliers de salariés de ce groupe capitaliste, dont un article du Financial Times annonçait le même jour qu'ils faisaient l'objet d'un vaste programme de licenciements signé Jean-Marie Messier.
Cette idéologie à un nom : c'est le corporatisme, la soumission des intérêts ouvriers à ceux du capital, au nom du prétendu" intérêt commun". C'est la négation de la lutte des classes, la recherche d'un consensus entre "la société civile d'en bas (Porto Alegre) et la société civile d'en haut présente au Forum économique mondial de Davos", pour reprendre les termes du Courrier d'information d'ATTAC (n° 217, vendredi 9 mars).
Cette idéologie à un axe politique : pas question de remettre en cause la propriété privée des moyens de production. « Le mythe "du passé faisons table rase" conduit à la barbarie. Il faut lier révolution et conservation », écrit l'un de ses penseurs, Edgar Morin, interviewé dans Libération, le 5 février dernier, à propos de Porto Alegre.
S'il ne s'agit plus de "faire table rase" de l'exploitation et de l'oppression à laquelle, dans le monde entier, le capital soumet la classe ouvrière et les peuples, alors, il ne reste plus qu'à "accompagner". C'est précisément ce à quoi se sont employés tous ceux qui s'étaient donné rendez-vous à Porto Alegre.
Parmi ceux-ci, M. Huwart, secrétaire d'État au "Commerce extérieur" du gouvernement de la "gauche plurielle" (1). Il est revenu de Porto Alegre parfaitement satisfait :
« Le Forum social n'a pas débouché sur une "internationale rebelle" ou "sur une résistance mondiale à l'OMC", il y a là une inflexion dans la démarche et une preuve de maturité. De la contestation, on est passé à la conviction que (la) démocratie participative peut trouver une place au sein même des institutions internationales, sans en nier la légitimité. »
Garantir la légitimité des "institutions internationales" (la Banque mondiale, l'Union européenne...) : comment ne serait-il pas satisfait, le représentant d'un gouvernement qui, au nom des directives de l'Union européenne, vient justement de rétablir le travail des enfants dès l'âge de 13 ans, remettre en cause les droits au congé de maternité des femmes au travail...
LEUR PRINCIPAL SOUCI : "COMMENT ÉVITER L'EFFET BOOMERANG ?"
"Les dangers d'un monde divisé" : c'était le titre et le thème d'un article paru dans le Financial Times sous la plume du directeur du Forum économique de Davos.
S'adressant, depuis Davos, aux organisateurs de Porto Alegre, John Ruggie, représentant de l'ONU, alertait, lui aussi :
"Nous avons créé uniquement un espace économique mondial dans lequel il n'y a pas place pour le social, l' environnement (...). Et, à moins que nous ne travaillions ensemble (...), il y aura un effet boomerang. "
Ce qu'ils craignent, c'est que la résistance difficile, opiniâtre, constante, que les masses opposent à leurs plans explose et déborde tous les obstacles dressés sur son chemin.
L'OCDE a consacré un véritable manuel de stratégie et de tactique visant à répondre à ce problème. Un recueil d'instructions pour les gouvernements confrontés aux difficultés de la mise en œuvre d'un "plan d'ajustement structurel". Au chapitre "Comment éviter les risques politiques? ", les auteurs examinent ce qu'ils considèrent comme l'un des principaux obstacles :
"Plus il existe des groupes d'intérêt puissants et bien organisés, plus la marge de manœuvre du gouvernement est réduite. "
Au premier rang de ces "groupes d'intérêt", les auteurs classent bien entendu "les syndicats". Il en découle la stratégie visant à réduire, démanteler ces "obstacles". Par exemple :
"La réduction des salaires et de l'emploi dans l'administration et dans les entreprises parapubliques figure, habituellement, parmi les principales mesures des programmes de stabilisation. En principe, elle est moins dangereuse politiquement que la hausse des prix à la consommation : elle suscite des grèves plutôt que des manifestations. "
Mais, elle touche "des secteurs où la proportion de syndiqués est la plus élevée (...), où la grève peut être une arme très efficace". Le gouvernement devra agir afin
"d'expliquer que le FMI imposant une baisse de 20 % de la masse salariale, le seul choix possible est de licencier ou de réduire les salaires et qu'il préfère la seconde solution dans l'intérêt de tous".
C'est l'argument du "bien commun", celui du "partage du travail et des revenus". Argument commun à l'Union européenne à la "gauche plurielle" en France et à tous les gouvernements au monde. Une politique qui vise à imposer aux organisations syndicales, au nom de l "'intérêt commun", l'abandon de la défense des intérêts de classe de leurs mandants. Autrement dit, leur suicide en tant qu'organisations de classe indépendantes.
C'EST LÀ QU'INTERVIENT LA PRÉTENDUE "SOCIÉTÉ CIVILE"...
Pour" atténuer" les" divisions sociales", un récent rapport de la Banque mondiale (2000-2001) recommande donc de mettre
"les parties adverses en présence dans le cadre de forums formels et informels, en canalisant les énergies par le biais des processus politiques, plutôt que de leur laisser l'affrontement comme seul exutoire".
C'est là qu'intervient la prétendue "société civile", les ONG, au rang desquelles ATTAC prend, après Porto Alegre, la place de leader.
"Il convient, souligne le Rapport de la Banque mondiale sur le développement dans le monde (2000-2001), que les institutions financières internationales et les autres organisations internationales poursuivent leurs efforts (...) pour mener un dialogue ouvert et régulier avec les organisations de la société civile, en particulier avec celles qui représentent les pauvres. Les organisations internationales doivent soutenir les coalitions mondiales de pauvres, afin qu'elles puissent être entendues dans le débat mondial. "
Se félicitant de la présence d'ONG, tant à Davos qu'à Porto Alegre, M. Claude Smadja invitait, dans Libération (26 janvier), à
"établir de nouvelles formes de partenariat entre représentants des secteurs publics, privés et de la société civile. Il faut bâtir des structures permanentes de discussion. "
Plus direct, M. Hassen Fodha, directeur du centre d'information de l'ONU à Paris, mettait les points sur les "i", dans une tribune libre publiée dix jours auparavant dans le même journal : il s'agit de maintenir "les aspirations populaires dans le giron des préoccupations gouvernementales". On ne peut être plus explicite.
Résumons : l'impasse dans laquelle le régime de la propriété privée des moyens de production est entré l'oblige à s'engager toujours plus loin dans une politique de destruction de la force de travail, des droits et garanties arrachés durant des décennies de luttes par les travailleurs et les peuples. Organisée, la classe ouvrière menace en permanence de retourner en "boomerang" cette offensive contre la classe capitaliste. Sans les appareils, s'employant à soustraire les organisations des mains de la classe ouvrières, à freiner, paralyser son action indépendante, le capital ne pourrait parvenir à ses fins. La "société civile", les ONG sont les instruments de cette politique.
Ce rôle dévolu aux ONG vaut bien, on l'admettra, les largesses de la Banque mondiale :
"Plus de 70 % des projets soutenus par la Banque mondiale approuvés l'année dernière ont impliqué des organisations non gouvernementales (ONG) et la société civile d'une certaine manière, alors qu'il y a cinq ans, moins de la moitié étaient dans ce cas, ce qui indique une tendance générale ascendante sur les deux dernières décennies (...). Les ONG et d'autres groupes de la société civile peuvent demander des subventions de 1 000 à 15 000 dollars pour mener des activités telles que des conférences et des séminaires, des dépenses de lancement de publications ou d'autres efforts innovateurs" (The World Bank and Civil Society, septembre 2000).
LE CENTRISME RÉACTIONNAIRE : POINTE AVANCÉE DE L'OFFENSIVE CORPORATISTE
Nous l'avons dit, le choix de Porto Alegre pour tenir le forum social ne devait rien au hasard. Ingnacio Ramonet, autre porte-parole d'ATTAC, s'en expliquait dans le Monde diplomatique, dont il est l'un des éditorialistes :
"Pourquoi précisément là ? Parce que Porto Alegre est devenue, depuis quelques années, une cité emblématique (...), une sorte de laboratoire social que les observateurs internationaux regardent avec une certaine fascination. "
Depuis près de dix ans, Porto Alegre, la capitale de l'État de Rio Grande do Sul (le Brésil est, rappelons-le un État fédéral, composé de vingt-six États et d'un district fédéral, Brasilia), est administrée depuis 1988 par une coalition de courants du Parti des travailleurs, au sein de laquelle les militants brésiliens du Secrétariat unifié occupent une place importante.
Ce qui "fascine" tous les "observateurs internationaux", c'est le "budget participatif", dont l'élaboration et la mise en œuvre reviennent incontestablement aux amis brésiliens de Krivine, Maïtan et compagnie. Une invention promise au plus fulgurant avenir, si l'on en croit la promotion que lui fait aujourd'hui la Banque mondiale (on lira par ailleurs, dans ce numéro, l'article de Julio Turra consacré à ce sujet).
Que cette trouvaille fonctionne comme un piège visant à entraver la lutte de classe et enchaîner les organisations ouvrières, c'est ce que montre cet extrait d'un dossier qui lui est consacré dans la revue Alternatives économiques, sous le titre "Viva 0 orçamento participativo" ("Vive le budget participatif', NDLR) :
"La démocratie directe ne concerne qu'une partie du budget.. les dépenses d'investissement. La structure des impôts, leur collecte, le financement de la dette de l'État et le paiement des fonctionnaires sont gérés de manière classique. Des grèves ont même éclaté récemment dans plusieurs secteurs de la fonction publique, déçus de ne pas mieux gagner leur vie après l'arrivée du PT au pouvoir. Ces mouvements traduisent clairement un nouveau conflit d'intérêts, qui oppose la fonction publique au peuple ou, plus justement, aux assemblées de l'" orçamento participativo ". Dans une même enveloppe budgétaire, le gouverneur ne peut en effet augmenter les professeurs sans réduire les allocations du budget participatif. Bref, mieux les profs sont payés et moins il reste d'argent pour construire les écoles. La démocratie directe entre ainsi en conflit avec les syndicats, sous le regard amusé des députés de l'assemblée d'État, majoritairement conservateurs. "
Allègre et Lang en rêvent! Ce n'est pas un hasard si, en France, cette "expérience" est reprise par le gouvernement Jospin dans un projet de loi se proposant d'institutionnaliser les "conseils de quartier" mettant en application la "démocratie participative" au service d'une politique de privatisations, de réduction des dépenses publiques et de destruction des bases mêmes de la démocratie communale, l'un des fondements de la démocratie.
Il y a en tout cela une logique. Pour trouver aujourd'hui sa place en exploitant frauduleusement le fonds de commerce du prétendu "trotskysme", le pablisme ne peut plus seulement se contenter d'être un courant révisionniste liquidateur, il ne peut plus se contenter d'être le flanc-garde des appareils, il lui faut désormais être la pointe avancée de l'offensive corporatiste.
A ceux qui seraient tentés de dire qu'encore une fois nous y allons un peu fort, nous conseillons la lecture de La Lettre de La Vérité, n° 161, 162 et 163 (2).
LEUR FONDS COMMUN : "L'HORIZON INDÉPASSABLE" DE LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE DES MOYENS DE PRODUCTION
Il y a un fonds commun à toute cette idéologie réactionnaire : la soumission à "l'horizon indépassable" de la propriété privée des moyens de production.
Lors d'un meeting convoqué à l'université de Jussieu par les JCR (organisation de jeunesse des pablistes en France), Michel Husson, présenté comme "un économiste de la LCR ", expliquait, après s'être "excusé de citer Marx" en jurant qu' "il n'en abuserait pas" :
"La mondialisation est un pas supplémentaire vers le marché mondial. "
C'est dire que le capital a encore un avenir devant lui. Pas étonnant, dans ces conditions, que M. Husson poursuive en déclarant :
"Nous ne sommes pas contre la mondialisation, nous sommes contre la manière dont elle se fait. "
C'est, on l'a vu, le regret de Cassen, le président d'ATTAC, de Kofi Annan, le secrétaire général de l'ONU, et de bien d'autres...
"L'alternative, c'est un nouvel internationalisme postulant la maîtrise des rapports vis-à-vis du marché mondial" (Michel Husson). Comme c'est joliment dit, n'est-ce pas : il ne s'agit pas d' "en finir avec le système de la propriété privée des moyens de production". La "maîtrise des rapports au marché" suffira, voyez-vous, la maîtrise seulement. Fini "le mythe du passé faisons table rase", comme dit Edgar Morin.
Pratiquement, cela donne ATTAC, au sein de laquelle militent d'ailleurs activement les adhérents du Secrétariat unifié. Devant l'université d'été d'ATTAC, en août dernier, à La Ciotat (France), M. Gustave Massiah, l'un des théoriciens de cette ONG, mettait à l'ordre du jour
"la définition d'un nouveau modèle de développement (...). Au-delà des effets de mode, le développement durable offre une piste. "
Le "développement durable", c'est très exactement le leitmotiv de la Banque mondiale, ce sont les plans d'ajustement destinés à "remédier aux déséquilibres structurels" que sont les déficits publics (lesquels exigent qu'on sabre dans les dépenses, les services et les emplois de fonctionnaires) et les déficits sociaux (lesquels exigent qu'on sabre dans les budgets de Sécurité sociale et de retraite, etc.).
"Il est certain, ajoutait M. Massiah devant les participants attentifs à l'université d'été d'ATTAC, que la réduction des déficits budgétaires, indispensable dans de nombreuses situations, implique souvent des mesures impopulaires,. il reste que des choix sont possibles et que les orientations qui sont décidées doivent être discutées et appréciées. La réussite d'une politique d'austérité repose d'abord sur la légitimité du pouvoir et l'adhésion populaire à sa politique. L'ajustement structurel imposé est certainement la plus mauvaise manière de répondre à ces impératifs. "
Est-il besoin de commenter? C'est la transcription parfaite du "manuel stratégique et tactique de l'OCDE pour la réussite de l'ajustement structurel".
"MAÎTRISER LES RAPPORTS VIS-À-VIS DU MARCHÉ" : LA "TAXE TOBIN"... AVEC LES BONS VŒUX DE SOROS
"L'appel de Porto Alegre", qui couronne, selon Rouge (8 février), "le pari réussi du Forum social mondial", réclame "l'introduction d'impôts sur les transactions financières". C'est la fameuse "taxe Tobin ", pour l'instauration de laquelle un "intergroupe parlementaire" s'est constitué à Strasbourg, auquel a aussitôt adhéré le député européen Krivine (3).
Une idée dont la portée "révolutionnaire" échappe encore aujourd'hui à son inventeur, l'économiste "néolibéral" James Tobin, qui déclarait encore récemment :
"Je ne comprends toujours pas comment cette proposition a pu être prise pour une proposition de gauche. "
Ce qui nous vaut cet édifiant dialogue au cours du fameux débat vidéo Davos Porto Alegre...
Bernard Cassen : "Vous nous demandez s'il y a un agenda alternatif, s'il y a des mesures à prendre. Bien oui, nous pouvons dès à présent vous répondre, avant même la fin du Forum social mondial (...). Par exemple, nous disons, il faut taxer très lourdement la spéculation financière, sur les monnaies, il faut mettre en place une taxe Tobin, de manière non seulement à diminuer l'instabilité financière - je suis désolé pour vous, M. Soros, ça vous retirera du travail ... , mais également pour produire des sommes qui serviront à satisfaire des besoins sociaux dont nous avons parlé. "
Réponse de George Soros (qualifié par Laurence Caramel, dans Le Monde, du 6 février, d'homme "qui poursuit aujourd'hui une double activité de généreux philanthrope et de spéculateur généralement avisé") :
"Cela va peut-être vous surprendre, mais je suis en faveur de la taxe Tobin. C'est une question sur laquelle nous pourrions discuter, il y a des problèmes et des difficultés techniques, mais cela pourrait être très utile à l'organisation internationale qui s'occupe de combattre et de soulager les maladies infectieuses, de trouver des fonds pour les écoles, etc. C'est contre mes intérêts personnels en tant que spéculateur, mais une telle taxe est pour l'intérêt commun."
Dénonçant "la dette externe des pays du Sud", l'appel de Porto Alegre demande
"son annulation inconditionnelle et la réparation des dettes historiques, sociales et écologiques, comme pas immédiats vers une solution définitive des crises que provoque la dette externe".
On ne peut être que favorable à l'annulation inconditionnelle de la dette non seulement des pays "du Sud", mais de tous les pays soumis aux diktats du FMI et des marchés financiers. "FMI, affameurs", "La dette n'est pas celle des peuples" : ces slogans de toutes les révoltes populaires dans le monde, nous les faisons nôtres.
Est-ce de cela qu'il s'agit?
"MAÎTRISER LES RAPPORTS VIS-À-VIS DU MARCHÉ" : LA PRÉTENDUE "RÉDUCTION DE LA DETTE DES PAYS LES PLUS PAUVRES"
L'an dernier, à Cologne, au sommet annuel du G 7, les gouvernements réunis et la Banque mondiale ont annoncé la mise en œuvre d'une initiative spectaculaire visant à la réduction de la dette "des pays les plus lourdement endettés", en majorité des pays africains.
Nombre des ONG présentes à Porto Alegre ont salué cette initiative comme un premier pas, certes insuffisant, mais qui allait dans le bon sens.
Un rapport établi par la commission Afrique du conseil général de la IVe Internationale établit la réalité de cette "initiative spectaculaire"
Le forum des parlementaires... en attendant les subsides de l'Union européenne
"Les parlementaires ont apporté leur pierre à l'édifice (de Porto Alegre - NDLR) en tenant un forum, s'émerveille Rouge (8 février 2001). C'était la première fois qu'une telle initiative était organisée lors d'une conférence internationale de résistance à la mondialisation. "
Une dépêche de l'AFP rapportait à ce propos le commentaire de M. Francis Wurtz (PCF), président du groupe de la "Gauche unitaire" européenne. On y trouve l'information suivante, dont nous ne voudrions pas priver nos lecteurs : "Le principe a été admis que le Parlement européen (autrement dit, l'Union européenne - NDLR) assurera la coordination technique du réseau pour des raisons de moyens financiers."
Comme on le voit, ces gens-là sont d'une totale "indépendance".
Rappelons que la "dette" des pays africains s'élève à plus de 300 milliards de dollars.
Et que le paiement annuel du service de la dette s'élève à plus de 30 milliards de dollars par an :
"Réductions" envisagées
Créanciers bilatéraux et commerciaux : 14,1 milliards de dollars
Banque mondiale : 6,3
FMI : 2,3
BAD/FAD : 2,2
BID : 1,1
Autres : 2,2
Même cette réduction a minima ne s'est pas concrétisée. Les créanciers bilatéraux et commerciaux censés participer pour 14,1 milliards de dollars à la réduction de la dette n'ont finalement contribué qu'à la hauteur de 326,5 millions de dollars, moins de 5 % de ce qui a été promis.
Le Congrès des États-Unis a refusé d'accorder à l'administration Clinton les 210 millions de dollars promis.
La Banque mondiale a considéré qu'effacer la dette affecterait sa position de "prêteur garanti".
La Banque de développement interaméricaine a jusqu'à maintenant refusé d'allouer ses propres fonds.
L'Union européenne s'est refusée à confirmer l'utilisation de fonds non dépensés venant du Fonds européen de développement parce qu'elle considère que les États-Unis devaient fournir une "part honnête" à l'abaissement de la dette.
Rappelons, par ailleurs, que les pays d'Afrique les plus lourdement endettés (en chiffres absolus) n'étaient pas concernés par cette initiative officielle de réduction de la dette. En particulier, n'étaient pas concernés l'Égypte, l'Algérie, l'Afrique du Sud. Ce dernier pays doit retenir particulièrement notre attention, dans la mesure où il s'agit de la dette héritée du régime de l'apartheid, qui a servi à financer la guerre contre l'Angola, le Mozambique et la répression.
Quand l'apartheid s'écroula en 1994, ce système laissa derrière lui une dette qui est désormais la plus grande composante des dépenses annuelles de l'Afrique du Sud après l'enseignement Dans le budget 1997-1998, le paiement du service de la dette signifierait sur toute l'année une dépense de 8,8 milliards de dollars.
De plus, il convient d'ajouter que cette initiative officielle de réduction de la dette s'accompagne de la mise en œuvre par le FMI et la Banque mondiale de nouvelles conditionnalités. Les pays qui veulent accéder à cette réduction se doivent d'appliquer avec succès un "cadre stratégique de lutte contre la pauvreté" (CSLP). De quoi s'agit-il? En réalité, "le cadre stratégique de lutte contre la pauvreté" n'est qu'un plan d'ajustement structurel (PAS) renforcé, comme le prouve un document du Fonds monétaire international "à ne pas communiquer au public" (SM/99/290, 12 janvier 2000). Ce document a été adressé aux membres du conseil d'administration du FMI. On peut lire, en particulier à propos du CSLP :
"Nombreux sont les domaines qui nécessiteront une action concomitante des services du FMI et de la Banque, par exemple, en vue de l'instauration d'un environnement propice à l'épanouissement de l'initiative privée, à la libéralisation des échanges et au développement du secteur financier (.H)' Partant de cette description, le CSLP présenterait une analyse des facteurs macro-économiques structurels, sociaux et institutionnels qui font obstacle à l'accélération de la croissance et au recul de la pauvreté. Elle mettrait en relief les obstacles à une croissance rapide et durable et les politiques convenues pour promouvoir une accélération de la croissance: réformes structurelles visant à créer des marchés libres et plus ouverts - libéralisation du commerce, privatisations et réforme fiscale - et mesures propres à créer un environnement stable et prévisible pour l'activité du secteur privé (...).
Les arbitrages à réaliser seraient précisés. Les nouvelles priorités de dépenses devront être compatibles avec la capacité d'exécution et non inflationnistes. Le CSLP devra, par conséquent, tenir compte de la mesure dans laquelle il est possible de réaffecter les dépenses et d'en accroître l'efficacité, de mobiliser de nouvelles ressources sans créer de distorsions et d'obtenir davantage de concours extérieurs. Etant entendu que l'objectif ultime est de faire reculer la pauvreté, il est inévitable que, dans certains cas, les mesures macro-économiques et structurelles nécessaires pour accélérer la croissance et corriger les déséquilibres extérieurs et intérieurs aient, dans un premier temps, un impact négatif sur les groupes vulnérables. "

Il s'agit donc bel et bien de tous les ingrédients classiques des plans d'ajustement structurel (PAS), rebaptisés "lutte contre la pauvreté" ; lequel plan, de l'aveu même du FMI, aura un "impact négatif sur les groupes vulnérables" !
Un autre document conjoint du FMI et de la Banque mondiale reconnaît que l'initiative en faveur des pays très endettés (PPTE) et les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté (CLSP) ne sont que prétextes à la mise en œuvre d'un ajustement structurel renforcé. Ce document cite en exemple deux pays, le Bénin et le Mali.
Concernant le Bénin, "les autorités ont fait savoir qu'elles souhaitaient obtenir un allégement de leur dette au titre de l'initiative PPTE renforcée. Par suite de retards dans la mise en œuvre de réformes structurelles majeures, il n'a pas été possible d'effectuer dans les délais prévus l'examen requis au titre de la deuxième FRPC annuelle. Parmi les réformes qui ne sont pas terminées, figurent la libéralisation du secteur cotonnier (qui influe fortement sur la stratégie de lutte contre la pauvreté en milieu rural) et l'adoption d'un système de rémunération fondé sur le mérite et d'un nouveau barème des traitements dans la fonction publique."
Concernant le Mali, "une mission conjointe Banque-Fonds s'est rendue au Mali en octobre 1999 pour examiner les progrès accomplis dans la mise en œuvre des mesures préalables à l'accession au point d'achèvement au titre du cadre PPTE initial. Les membres de la mission sont parvenus à la conclusion que le Mali n'avait pas appliqué ces mesures, particulièrement celles qui concernent les secteurs structurels et sociaux" (Rapports d'avancement sur l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés {PPTE] et les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté (CSLP]), 15 avril 2000, Development Committee (joint ministerial Committee of the Boards of Governors of the Bank and the Fund Transfer of Real Resources to Developing Countries).
Les ONG, qui, comme d'habitude, avaient organisé un "contre-sommet" à l'occasion de la réunion du G 7 à Cologne, qui a débattu et mis en œuvre le plan "officiel" de réduction de la dette, sont depuis particulièrement discrètes. Et pour cause! Les ONG ("société civile") sont appelées à jouer un rôle central dans la mise en œuvre de ce PAS renforcé qu'est le CSLP. Dans le document du FMI "à ne pas communiquer au public", cité plus haut, on peut lire :
"(Il s'avère nécessaire) l'inclusion d'un éventail de participants de la société civile et d'autres parties prenantes aussi large que possible, de manière à représenter les points de vue des pauvres. Il est souhaitable que la société civile participe au suivi de la mise en œuvre de la stratégie et de la réalisation des indicateurs de performance. "
Il s'agit d'une participation payante, comme l'explique le World Bank Operational Manual, publié en février 2000, où on peut lire :
« Il est souvent rentable, du point de vue des coûts, d'utiliser les ONG. Elles ne devraient néanmoins pas être considérées comme une "alternative à bas prix" par rapport à d'autres types d'application. Le fait que certaines ONG co financent des projets ou donnent des conseils ou des services gratuits a abouti à une certaine ambiguïté quant au statut des ONG et quant aux sommes qui devraient leur être versées. Toutes les parties concernées devraient comprendre la nature exacte de l'implication des ONG (c'est-à-dire conseillers informels et sans salaire), consultants salariés de la Banque ou du gouvernement dès le début et, comme cela est nécessaire, établir des charges et des coûts mutuellement acceptables. On ne devrait pas attendre des ONG qu'elles fournissent des services contractuels gratuits ou qu'elles acceptent des compensations inférieures au taux existant sur la marché. "
Un rappel, donc, que la dette qui tue les peuples est aussi composée de l'argent qui sert à financer les ONG !
REGROUPER À L'ÉCHELLE INTERNATIONALE LES FORCES QUI SE SITUENT SUR LE TERRAIN DE L'INDÉPENDANCE DE CLASSE
A cette politique réactionnaire, nous opposons le regroupement international des forces qui se situent sur le terrain de l'indépendance de classe et de la défense des droits ouvriers et de la démocratie.
La signification de la conférence mondiale contre la déréglementation, c'est de traduire un mouvement déjà engagé dans la lutte des classes sur la ligne de défense des garanties et des droits ouvriers existants, mouvement de reconquête de l'ensemble des droits et des institutions ouvrières détruites.
La signification de cette conférence, c'est la généralisation du mouvement qui a imposé un recul au gouvernement Poutine, qui prétendait remettre en cause le Code du travail en Russie. Résultat concomitant à la rupture de la COSATU (la centrale syndicale sud-africaine) avec le gouvernement ANC-PC sud-africain, sur la question précisément du Code du travail. Concomitant également avec la mobilisation des travailleurs indiens avec leurs confédérations syndicales contre la "réforme du Code du travail" et avec le processus qui voit, en Allemagne, de larges secteurs de la social-démocratie et de la centrale syndicale DGB se dresser contre la "réforme des systèmes de retraite".
La ligne de la conférence mondiale, c'est précisément de faire converger l'ensemble de ces processus, qui posent la question de l'indépendance des organisations ouvrières.
"Nous partons de la mise en œuvre des moyens politiques et d'organisation pour aider les exploités et les opprimés à vaincre, dans et par leur lutte de classe, le système décadent de l'impérialisme mondial",
était-il écrit le 12 janvier dernier dans une note préparatoire au conseil général de la IVe Internationale :
« Ce qui fonde la possibilité de "vaincre" pour le prolétariat et les masses opprimées, c'est la réponse à cette première question: les conditions objectives sont-elles réunies pour assurer la victoire du prolétariat?
Ce qui amène à une seconde question, à laquelle il serait erroné de ne pas intégrer les conséquences de l'offensive de destruction de la force de travail générée par le système pourrissant de la propriété privée des moyens de production : les conditions de la lutte de classe sont-elles toujours réunies pour répondre positivement aux tâches découlant des principes du programme de la IVe Internationale, lequel définit dans son premier chapitre :
"La situation politique mondiale dans son ensemble se caractérise avant tout par la crise historique de la direction du prolétariat" ?
Le marxisme nous enseigne que le développement des forces productives est le facteur fondamental du progrès historique. Le facteur fondamental, les forces de production mises en œuvre par la force de travail, se reflète dans le domaine idéologique. Abandonner le critère des forces productives, c'est abandonner la perspective historique, la méthode du marxisme historique telle que Marx l'a établie :
"Selon notre conception, tous les conflits de l'histoire ont leur origine dans la contradiction entre les forces productives et le mode d'échange.
Les individus isolés ne forment une classe que pour autant qu'ils doivent mener une lutte commune contre une autre classe, pour le reste ils se retrouvent ennemis dans la concurrence.
Les individus acquièrent leur liberté simultanément à leur association, grâce à cette association et en elle.
L'histoire est le développement des forces productives, du développement des forces des individus eux-mêmes.
C'est ce qui explique également pourquoi la conscience peut anticiper les rapports sociaux, si bien que les luttes de classe peuvent s'appuyer sur la conscience théorique qui se dégage des besoins, de la nécessité de détruire les formes sociales (propriété privée) qui se dressent contre le développement des forces productives.
L'appropriation collective des forces productives ayant pris possession du marché mondial ne peut s'accomplir que par une union obligatoirement universelle et par une révolution, qui renversera, d'une part, la puissance du mode de production et d'échange précédent (propriété privée), ainsi que le pouvoir de la structure sociale antérieure, et qui développera, d'autre part, le caractère universel du prolétariat et l'énergie qui lui est nécessaire pour mener à bien cette appropriation collective, une révolution enfin où le prolétariat se dépouillera en outre de tout ce qui lui reste encore de sa position sociale antérieure.
Avec l'appropriation de la totalité des forces productives par les individus réunis (associés), la propriété privée se trouve abolie."
(...) Aussi pourrissant qu'il soit devenu, le mode de production capitaliste ne peut survivre que par l'exploitation du prolétariat et l'oppression des masses. La nouvelle économie de la spéculation se nourrit de la destruction de la force de travail qui met en mouvement les forces productives (déréglementation, mobilité détériorant les conditions de vie et de travail, chômage, travail et militarisation des enfants, paupérisation absolue, etc.). "Qui l'emportera?" reste la question historique majeure. Elle se pose dans des conditions nouvelles. Cependant, si la nouvelle économie de la spéculation se nourrit de la destruction de la force de travail qui met en œuvre les forces productives, elle ne peut survivre qu'à la condition de s'assurer l'exploitation renforcée de la force de travail.
C'est ainsi que le destin de l'humanité est posé en premier lieu en termes de rythmes.. le rythme de la décomposition du système pourrissant de la propriété privée, détruisant les bases matérielles de la civilisation, sera-t-il freiné par la résistance de la force de travail à sa propre destruction? Quelle réponse à cette question?
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la résistance des exploités et des opprimés, autrement dit la lutte des classes, reste, dans les conditions les plus difficiles, le moteur de l'histoire. Cette réalité est paradoxale pour qui ne part pas, pour apprécier la situation, de la perspective historique concentrée dans l'alternative socialisme ou barbarie. Plus précisément.. la "nouvelle économie de la mondialisation ", tout en nourrissant la destruction des forces productives, la destruction de la force de travail qui les met en œuvre, dépend toujours de l'extraction de la plus-value, qui reste le moteur du système putréfié de la propriété privée capitaliste des moyens de production.
C'est ainsi que nous pouvons déduire.. le rythme de la décomposition des forces productives matérielles est plus rapide que la destruction de la force de travail qui les met en œuvre. Nous devons en conclure.. objectivement, la lutte de classe, y compris dans cette période de décomposition accélérée du mode de production capitaliste, reste le moteur de l'histoire. La révolution reste à l'ordre du jour.
La société capitaliste s'est d'elle-même engagée dans l'impasse. Elle n'est plus capable de développer les forces productives. Au contraire, que ce soit dans les pays avancés ou dans les pays retardés, le système pourrissant de la propriété privée conduit la société à la barbarie. Seule la révolution est à même de résoudre positivement l'alternative "socialisme ou barbarie". Tel est l'enjeu mondial de la lutte des classes. "
La crise historique de l'humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire". »
Par Jean-Pierre Raffi(La Vérité n°28 - avril 2001)
(2) La Lettre de La Vérité est un bulletin hebdomadaire édité par la section française de la Ive Internationale, le Courant communiste internationaliste du Parti des travailleurs.
(3) Nous ne nous attarderons pas ici sur les obscures raisons qui ont conduit Alain Krivine (LCR) et Arlette Laguiller (LO), parlementaires européens, à s'abstenir lors du vote sur "la faisabilité de la taxe Tobin"... De la laborieuse explication apportée par Krivine à un contradicteur lors du meeting de Jussieu, on a cru comprendre qu'en fin de compte, tous les votes au "Parlement européen" étaient piégés, soumis à la règle du "consensus"... C'est sûrement vrai, vu la fonction dévolue à cette institution, qui n'a de "parlement" que le nom. De là à se demander ce qu'ils y font...

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Davos Porto Alegre : rencontre au sommet...

Au moment où ATTAC réunissait à Porto Alegre (Brésil) le Forum social mondial, se tenait à Davos (Suisse) le Forum économique mondial, qui réunit, depuis 1970, économistes, ministres de l'Économie, dirigeants de multinationales et leaders des institutions internationales du capital financier.
La coïncidence de date n'est pas fortuite, elle était même programmée par les organisateurs de Porto Alegre, qui, en retour, ont bénéficié d'un patronage de choix : celui du secrétaire général des Nations unies, M. Kofi Annan. Dans une lettre au gouverneur de l'État du Rio Grande do Sul, Olivio Dutra, M. Annan souhaitait "tout le succès possible au forum", qui, selon lui, s'inscrivait parfaitement dans la continuité du "Sommet du millénaire des Nations unies, et la déclaration officielle adoptée par la réunion démontre que souligner les bénéfices inégaux de la globalisation et mettre en place des actions urgentes pour améliorer partout la vie des hommes sont parmi les plus hautes priorités de la communauté internationale".
Rappelons que le "Sommet du millénaire de l'ONU" (septembre 2000) s'est conclu par un appel à "la mise en œuvre de la libre concurrence dans le monde entier comme le seul véhicule viable pour la prospérité", considérant qu'il est "nécessaire d'étendre les avantages de ce système de libre commerce à l'ensemble des peuples" (les travailleurs, dans tous les pays où la privatisation massive des entreprises publiques et nationalisées a provoqué des millions de licenciements, le chômage, la destruction massive de la production, apprécieront).
La "prospérité des peuples", parlons-en! L'ONU, qui a donné son aval aux bombardements de l'OTAN contre le peuple irakien et ceux de l'ex-Yougoslavie, s'y connaît!
Reste que M. le Secrétaire général était bien soucieux: il savait où il voulait en venir : établir un "bloc compact entre les chefs d'entreprise, la société civile et les Nations unies". Mais alors qu'il s'y emploie déjà depuis pas mal de temps avec les autres institutions, la Banque mondiale, l'Union européenne... et les gouvernements, il ne savait pas trop bien comment y parvenir. Que lui manquait-il? Il lui manquait le Forum de Porto Alegre, réunissant la "société civile", les ONG, des syndicats, une brochette de ministres, des chefs d'entreprise...

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