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UN NOUVEAU PRINCIPE CONSTITUTIONNEL EUROPÉEN

ANALYSE
Giscard d'Estaing, qui préside la "Convention européenne" en charge de rédiger le projet de "traité constitutionnel européen", en a présenté un premier avant–projet, le 28 octobre.
Le texte devrait être finalisé d'ici à juin prochain et adopté dans chaque pays en 2004. Giscard, à propos de ses nouvelles tâches européennes, parlait, le 23 juillet dernier, de "la dernière chance de l'Europe unie", "tiraillée entre les désirs contraires de faire fonctionner un grand marché et de conserver des régimes de protection sociale et de prélèvement fiscal très différents".
Comme on ne peut douter de l'engagement de Giscard pour le "grand marché", on doit en conclure que l'un des objectifs de la "Constitution européenne" qu'il doit préparer est donc de permettre d'en finir avec les "régimes de protection sociale" nationaux : Et son projet de "traité constitutionnel européen" serait même "la dernière chance" d'y arriver.
Un nouveau principe fait son apparition dans l'avant–projet de "Constitution européenne" : c'est celui de la "démocratie participative", qui a droit à un article entier.
La "démocratie participative" et le "budget participatif" ont été inventés par les amis brésiliens de la LCR (qui forment un courant du Parti des travailleurs du Brésil) à la tête de la ville de Porto Alegre. Ils organisent chaque année un Forum social mondial, dont une édition européenne se tient cette semaine à Florence, en Italie.
Pourquoi Giscard reprend–t–il cette idée? Parce qu'elle a permis, à Porto Alegre, de faire payer mieux qu'ailleurs la dette qui saigne le pays. Comment? En conduisant les organisations ouvrières à prendre la responsabilité, face à la population et aux travailleurs, des "priorités" pour l'utilisation de l'argent qui restait… une fois cette dette payée!
Difficile d'appeler à résister contre une "décision" à laquelle on a soi–même pris part. Tel est le concentré de la "démocratie participative".
À Porto Alegre, tout comme dans l'État de Rio Grande do Sul, dont elle est la capitale, les tenants du "budget participatif" perdent des voix (ils ont même perdu la direction de l'État), alors que partout ailleurs dans le pays, le Parti des travailleurs progresse.
BERNARD LEDUC    (semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)

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LES FAITS

Organisé à la suite du Forum social mondial de Porto Alegre, un Forum social européen va s'ouvrir à Florence (Italie), le 7 novembre. Parmi les principaux participants, la Confédération européenne des syndicats (CES), dont le secrétaire général est Emilio Gabaglio.
Emilio Gabaglio, secrétaire de la mal nommée Confédération européenne des syndicats (CES), vient d'être largement interviewé à propos de la participation de la CES au Forum social de Florence par le journal du PCF, L'Humanité (4 novembre).
Cette interview est intéressante par ce qu'elle contient, mais peut-être tout autant par ce qu'elle ne contient pas.
Qu'on excuse cette liste un peu longue et exhaustive des quelques oublis de ce "dirigeant syndical européen". En effet, vous chercherez en vain les termes de "convention collective", "statut", "fonctionnaire d'État", "services publics", "licenciements", "conventions de l'OIT", "travail de nuit des femmes dans l'industrie", "droit de grève" ("grève" tout court, d'ailleurs), "Sécurité sociale", "indépendance syndicale", "retraites par répartition"...
Non seulement ces revendications ouvrières, qui fondent l'existence des organisations syndicales dans chaque pays, ne sont pas défendues, mais les termes mêmes sont occultés. Exercice difficile, mais réussi. Superstitieux, sans doute, Gabaglio !
Alors que les salariés de Fiat, en Italie, pays de Gabaglio, sont frappés brutalement par une vague de licenciements (voir notre dernier numéro), alors que les salariés et leurs organisations syndicales, par la grève et les manifestations, résistent à cette offensive destructrice ; pas un mot du "syndicaliste" Gabaglio, qui, au nom de la CES, prétend représenter les syndicats d'Europe.
Gabaglio a mieux à faire. Il prépare le Forum social européen de Florence. Que dit-il? "Il faut à nos yeux une gouvernance mondiale de la globalisation économique et, dans le même temps, une globalisation des droits humains, de la justice sociale." C'est ce que revendiquent également les dirigeants du FMI et de l'OMC.
"Nous nous opposons, poursuit-il, à ceux qui préconisent un repli de l'État national". Et, pour faire bonne mesure, de regretter "que l'on n'avance pas vers une véritable gouvernance de l'économie européenne pour mettre les acquis - le marché et la monnaie uniques - au service du développement durable..."
Le marché commun européen et l'euro sont, d'après Gabaglio, des acquis à défendre. Plus facile à dire dans les colonnes de L'Humanité ou au Forum social européen de Florence que devant les ouvriers de Fiat.
"L'UNION EUROPÉENNE PEUT CONSTITUER UN ANTIDOTE A LA GLOBALISATION DÉBRIDÉE" (EMILIO GABAGLIO)
Gabaglio ajoute que la CES prépare une contribution pour la commission de réforme de l'Europe présidée par Giscard. Drôle de syndicaliste, ce Gabaglio, dont le premier combat annoncé est de s'opposer "à ceux qui préconisent le repli sur l'État national".
Qui visez-vous, monsieur Gabaglio ? Les organisations syndicales nationales, les confédérations ouvrières qui refusent la régionalisation-décentralisation, cette machine de destruction des droits lancée par vos amis de l'Union européenne? A qui vous en prenez-vous? Aux ouvriers de Fiat, qui refusent d'être sacrifiés au nom de ce que vous appelez "les acquis du marché unique et de l'euro", qui ne sont rien d'autre que les instruments du Fonds monétaire international (FMI) et de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ?
Gabaglio va au sommet de Florence "dans le même état d'esprit que celui qui l'a conduit à Porto Alegre. Nous partageons les préoccupations de cette mouvance (...). Nous considérons que l'Union européenne en tant que telle, cette Europe que nous voulons continuer de construire, peut constituer un antidote, un contrepoids au processus de globalisation débridée."
Voilà l'Union européenne baptisée "antidote de la globalisation débridée", comme l'euro serait l'antidote du dollar. Quel syndicaliste qui réfléchit peut avaler de telles couleuvres?
Pourquoi Gabaglio va-t-il au Forum social européen de Florence? Tout simplement pour impliquer les organisations ouvrières dans la mise en œuvre des plans de l'Union européenne, pour tenter d'en faire les coresponsables avec les représentants de la prétendue "société civile" réunis dans les différents forums et d'y ajouter une "dimension sociale".
N'est-ce pas le baron Pierre de Coubertin qui, à propos des Jeux olympiques, déclarait : "L"essentiel est de participer."
On pourrait ajouter : "Et vous ne pourrez pas dire que vous n'y étiez pas."
GÉRARD BAUVERT    (semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)

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ILS ONT DIT

Vittorio Agnoletto, membre du secrétariat du Forum social mondial de Porto Alegre
"INVITÉ PAR UNE ASSOCIATION PATRONALE"
"Nous sommes dans une phase de forte croissance, surtout dans notre capacité d'impliquer des catégories sociales complètement différentes de nous. Mardi soir, je serai à Prato, non loin de Florence, invité par une association patronale de PME (...). Nous trouverons des points d'accord avec des gens très différents de nous"
(L'Humanité, 5 novembre)    (semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)


Annick Coupé, fondatrice de SUD-PTT
"FAIRE SE RENCONTRER DES MOUVEMENTS SOCIAUX ET SYNDICAUX DIVERS"
"A Florence, c'est la première fois que l'on parvient à faire se rencontrer autant de mouvements sociaux et syndicaux sur des thèmes divers" (L'Humanité, 5 novembre). Y compris des patrons, si l'on en croit Vittorio Agnoletto (ci-dessus). Pourquoi Annick Coupé ne le dit-elle pas?
(semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)

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(suite)

La LCR
"NE PAS LAISSER LE TERRAIN DE LA REFONTE DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES À LA DROITE"
La LCR (organisation de Krivine et Besancenot), qui participera au Forum social européen et dont la direction est très impliquée dans tout ce processus, considère que "le succès du FSE ne sera complet que s'il initie une réflexion et commence à esquisser une réponse alternative à la refonte des institutions mises en œuvre par la convention présidée par Giscard d'Estaing.
Laisser ce terrain à la droite, à la social-démocratie et à ses alliés serait dramatique (...). La confrontation entre mouvements sociaux, mouvement syndical et partis politiques, avec la volonté de dessiner des convergences de mobilisation sur tous les plans, y compris institutionnel, est aujourd'hui une nécessité.
Et rien ne serait pire qu'une sorte de division du travail du type : aux mouvements sociaux les mobilisations sociales, aux partis politiques les questions institutionnelles"

(www.lcr-rouge/blocnot1.html).
(semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)

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BON À SAVOIR

CONTACT AVEC LA CONVENTION EUROPÉENNE DE GISCARD

Sur le site Internet du Forum social européen, on apprend que "le groupe de travail (préparatoire au Forum social européen) prendra contact avec le groupe de travail de Ia société civile pour la Convention européenne, qui élabore un réseau d'organisations en vue d'influencer le processus de la Convention européenne".
(semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)


QUI PAIE?
Au cours de I'une de leurs réunions préparatoires tenue à Bruxelles, le 8 septembre, les organisateurs du Forum social européen ont détaillé la partie recettes de leurs budget : "400 000 euros de subvention de la région toscane (en pratique, toutes les locations de salles), 300 000 euros d'inscription, 100 000 euros de produits dérivés (boissons, ventes, etc.), 70 000 euros de la ville de Florence, 100 000 euros de subvention de collectivités locales de Florence et la région (non garanti)."
C'est-à-dire que, sur 970 000 euros de recettes attendues, près de 60 % proviennent de financements publics émanant de gouvernements et d'exécutifs locaux.
(semaine du 6 au 12 novembre 2002 – n°563)

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Florence: des centaines de milliers de manifestants contre la guerre

D'après les chiffres officiels, ils étaient plus de 450 000. D'après les organisateurs (le Forum social), plus d'un million. Qui pourrait donner un chiffre précis? De toute l'Italie, des centaines de milliers de travailleurs, de jeunes, de citoyens ont convergé dans les rues de Florence pour dire : "Non à la guerre !"
Toutes les prévisions ont été dépassées. La résolution que l'ONU avait adoptée la veille a donné la dernière impulsion à cette immense marée humaine, qui exprimait la volonté du euple italien, et à travers lui des peuples d'Europe, d'arrêter la guerre décrétée par Bush.
Deux mots d'ordre étaient partout présents : "Non à la guerre", "Défense du peuple palestinien ".
C'est une masse d'étudiants et de jeunes travailleurs qui a déferlé, venus avec banderoles et drapeaux, parce qu'ils rejettent la guerre comme la principale expression du sort que le système capitaliste leur réserve.
En tête de la manifestation, une grande banderole rouge des ouvriers de la Fiat de Milan, qui fut ensuite fixée sur la tribune. Puis, d'autres cortèges syndicaux, notamment de la centrale syndicale CGIL. Des secteurs importants de la classe ouvrière italienne se sont donné rendez-vous à Florence contre la guerre de Bush et de Berlusconi, cela d'autant plus que les travailleurs italiens font face aujourd'hui à une guerre déchaînée contre leurs droits et leur existence même.
Ces travailleurs, syndicalistes, jeunes qui manifestaient sont ceux-là mêmes qui luttent pour la survie de pans entiers de l'industrie italienne (lire ci-contre) contre l'offensive des multinationales américaines, contre le chômage, la précarité ou pour la défense de l'école, au moment où le budget 2003 élaboré par Berlusconi afin de tenir ses engagements vis-à-vis de l'Union européenne se heurte à une opposition généralisée.
La colère des peuples d'Europe contre la guerre, c'est aussi la colère contre le démantèlement économique et social.
La manifestation de Florence se produit après celles de Londres, New York, San Francisco, Lahore.
Les références au mouvement antiguerre aux États-Unis et à l'appel "Pas en notre nom !" ont été chaleureusement acclamées à chaque évocation du mouvement antiguerre américain.
C'est la première grande mobilisation de masse contre la guerre après le vote de la résolution de l'ONU.
La mobilisation des travailleurs et du peuple italiens est un appel à réaliser l'unité, dans toute l'Europe et à l'échelle mondiale pour arrêter la guerre. Tout de suite.
MANUEL CUSO    (semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)

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Vu et entendu au "Forum social européen", à Florence

DU 6 À 10 NOVEMBRE, S'EST TENU À FLORENCE (ITALIE) LE PREMIER DES "FORUMS SOCIAUX" CONTINENTAUX À LA SUITE DU FORUM SOCIAL MONDIAL DE PORTO ALEGRE (BRÉSIL).

Le Forum social et la privatisation des services publics

REPORTAGE
Entre les nombreux sujets abordés par les orateurs du meeting de clôture, celui des services publics a eu une place importante. Impressions de retour de Florence d'un de nos lecteurs.
L'introduction m'a semblé répondre à la situation : "Partout en Europe, à l'initiative de l'Organisation mondiale du commerce, de l'Union européenne, les gouvernements organisent la privatisation des services publics. Notre position est : refus total de toute privatisation, de toute libéralisation des services publics."
Après avoir proposé des initiatives, telles qu'un "Livre vert", ou des actions lors du Forum de Davos, le même porte-parole a ajouté : "Il ne faut pourtant pas se limiter à la défense des services publics étatiques, il faut chercher de nouvelles formes de services publics, démocratiques, une recomposition des services publics avec une plus grande participation."
J'avoue que je n'ai pas très bien compris. Qu'est-ce donc qu'un service public "non étatique" ? J'ai lu ensuite sur un site Internet cette déclaration d'une responsable : "Trop souvent, la seule solution évoquée reste la défense de la grosse entreprise nationalisée et bureaucratisée. Il est nécessaire de refonder les services publics actuels, mais les syndicalistes sont peu ouverts là-dessus" (Sarah Valin, de l'Association internationale des techniciens, experts et chercheurs).
Cela, je l'ai entendu bien des fois à Florence et je ne suis vraiment pas d'accord. Les dénonciations de "bureaucratisme", autrement dit d'inefficacité, ce sont ceux qui organisent les privatisations qui les lancent.
QU'EST-CE DONC QU'UN SERVICE PUBLIC"NON ÉTATIQUE"?
Sous diverses formes, cette ambiguïté (double langage ?) est réapparue. Par exemple, lorsque le porte-parole sur la santé a invité le meeting à lutter pour "une autre santé possible" en demandant "un nouveau modèle de systèmes nationaux de santé", faudrait-il abandonner la défense des "vieux" systèmes de santé que tous les gouvernements veulent démanteler?
Sur cette même ligne, on a dit non à la privatisation de l'eau. Et c'est bien. Mais dans le séminaire sur "la gouvernance mondiale", j'ai entendu la tribune faire le classement suivant : l'environnement, ce devrait être public, mais l'eau, l'énergie, ce devrait être "mixte"... c'est-à-dire qu'EDF doit être privatisée, que l'eau doit être privatisée. Et, là encore, comment être d'accord?
MICHEL TRAVERS    (semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)

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Le Forum social et la guerre

CORRESPONDANCE
Le Forum social européen a donné une place importante à la question de la guerre. Même Susan George, vice-présidente d'ATTAC-France, qui, après le 11 septembre, avait soutenu Bush, a affirmé en conclusion d'une des conférences du forum ("L'Europe dans le nouvel ordre mondial") : "Désormais, il est clair que la lutte contre la guerre et la lutte contre le néo-libéralisme est la même chose, notre mouvement va contre la guerre de Bush et les désastres du néo-libéralisme". Qu'a-t-il été décidé? Voici ce qu'une correspondante italienne nous écrit.
« La manifestation était énorme. Je suis sûre qu'en développant dans tous les pays ce mouvement, on peut aller très loin. C'est avant tout avec cet espoir que je suis allée le lendemain à la grande "assemblée des mouvements sociaux européens", dans la Stazione Leopolda. Sans attendre le début des discours, les slogans contre la guerre se sont fait entendre.
J'AI APPLAUDI, MAIS EN MÊME TEMPS, J'AI SENTI UNE SORTE DE VIDE
Après les introductions, les orateurs ont parlé d'arrêter la guerre. Des ovations ont répondu aux affirmations sur une journée européenne contre la guerre, ou même sur une grève générale contre la guerre. J'ai fait très attention au discours des collègues anglais, qui ont expliqué ce qui avait été élaboré pendant le forum, d'où est sorti un plan en trois points :
- tout de suite, on organise dans chaque pays des mobilisations contre la guerre, contre la résolution de l'ONU et la guerre de Bush ;
- si la guerre commence, le samedi suivant on manifestera devant toutes les ambassades des États-Unis ;
- on organise d'ores et déjà une grande journée européenne contre la guerre pour le 15 février.
J'ai applaudi. Nous avons tous applaudi, encore remplis de l'énergie de la manifestation de la veille. Mais en même temps, j'ai senti une sorte de vide. Les journaux expliquaient que l'ONU avait voté une résolution terrible. Bush finit les préparatifs de guerre. L'Irak est menacé d'une destruction. Et là, ils avaient décidé qu'il n'y aurait pas de journée européenne contre la guerre dans l'immédiat, avant que la guerre ne déferle.»
I.T.    (semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)

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Le Forum social et les retraites

L'association ATTAC a consacré un séminaire du Forum social européen à "la lutte pour les services publics, partie intégrante de la lutte contre la mondialisation libérale".
Dans un document sur le "processus de privatisation", un dénommé Michel Husson évoque, à juste titre, la question des retraites. Définissant les retraites par répartition, il écrit : "Dans les retraites par répartition, il y a un pot commun où les gens contribuent, en fait ce sont les entrepreneurs qui contribuent, et cette fraction de la masse salariale est ensuite répartie proportionnellement au nombre de retraités."
"Ce sont les entrepreneurs qui contribuent" ? Les cotisations qui financent les systèmes de retraite sont-elles payées par les employeurs? Non. La cotisation dite patronale et la cotisation dite ouvrière forment toutes les deux le salaire différé, appartenant au salarié, qui, au lieu de lui être versé directement, est versé aux caisses de solidarité ouvrière que sont les régimes de retraite. D'ailleurs, Michel Husson parle, lui-même, de "fraction de la masse salariale". Alors, pourquoi dire que "ce sont les entrepreneurs qui contribuent" ?
"Fraction de la masse salariale", les cotisations sont répercutées dans le prix de revient des marchandises, que les salariés, la majorité de la population, payent comme consommateurs.
Donc, les patrons mentent quand ils parlent des "charges des entreprises". Et ce mensonge a un seul but : remettre en cause les régimes de retraite pour faire main basse sur ce salaire différé et l'injecter dans les fonds de pension et la spéculation. Pourquoi ne pas le dire?
Michel Husson nous explique que les contributions sont ensuite "réparties proportionnellement au nombre de retraités". Qu'est-ce que cette histoire?
"CE SONT LES ENTREPRENEURS QUI CONTRIBUENT"?
Tout salarié sait bien que le montant de sa retraite n'est pas calculé au prorata du nombre de retraités, mais en fonction de la durée de cotisation et du salaire de référence. C'est le lien entre le contrat de travail et la retraite qui est à la base des retraites par répartition.
Détail technique? Non, car si le montant des retraites dépendait du nombre de retraités, alors le "papy boom" de 2005 se traduirait inéluctablement par une baisse de la retraite pour chacun, comme on l'entend dire mensongèrement!
L'exigence du retour aux 37,5 annuités pour le privé deviendrait-elle alors déplacée ? Ces questions sont concrètes!
Alors, pourquoi dire des choses fausses?
A juste titre, Michel Husson dénonce les exonérations dont les patrons ont bénéficié depuis des années. On peut s'étonner, toutefois, de le voir ajouter : "Sans se poser la question de savoir si ces baisses de charges seraient compensées dans le budget de la Sécurité sociale".
Certes, il est scandaleux que le gouvernement Jospin n'ait pas remboursé à la Sécurité sociale la totalité des exonérations votées avec la loi Aubry dite "des 35 heures". Mais une question reste entièrement posée : la compensation des exonérations, c'est le budget de l'État, c'est l'impôt. Faut-il que les employeurs continuent d'être exonérés et que la Sécurité sociale soit financée par l'impôt? C'est ce qu'a commencé à instaurer Michel Rocard avec la CSG. Quel en est le résultat?
Le gouvernement Raffarin nous explique aujourd'hui qu'il faut "séparer ce qui relève de la solidarité nationale (donc une assurance a minima financée par l'impôt – NDLR) et ce qui relève des assurances complémentaires" (donc du privé) (voir article dans ce journal)
Il veut tourner la page de la Sécurité sociale de 1945 garantissant à tous l'égal accès aux soins et des retraites calculées à partir des salaires d'activité. C'est par là que passe l'offensive brutale des fonds de pension.
NICOLE VILLA    (semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)

REMARQUE
Parlant des fonds de pension, Michel Husson nous dit qu'avec la retraite par capitalisation, "Votre retraite ne sera payée qu'en fonction de ce que vous aurez versé, vous individuellement, et sans aucune péréquation entre les différents individus". Certes, mais, en réalité, que toucherions-nous de notre retraite? Michel Husson parle ailleurs de l'effondrement d'Enron, dont "les salariés ont perdu non seulement leur emploi, mais aussi leurs retraites".
Y aurait-il, d'un côté, une "affaire Enron", frauduleuse, et de l'autre côté, un système par capitalisation où l'on toucherait ce que l'on aurait versé? Le sort des salariés d'Enron, c'est notre avenir si la mobilisation unie des salariés et de leurs organisations ne stoppe pas les plans meurtriers contre les retraites.
(semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)

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ILS ONT DIT

Rafaella Bolini, membre du comité d'organisation du Forum social
"L'Europe peut être un formidable tremplin démocratique et montrer, enfin, qu'elle rêve d'un autre destin que d'être la sœur jumelle des États-Unis. Il faut profiter du débat sur la Convention européenne pour faire entendre nos désirs de citoyens et réoxygéner l'idéal européen" (Libération, 9 novembre 2002).
La Convention européenne, présidée par Giscard, est chargée d'élaborer une "Constitution européenne" dans la "continuité juridique par rapport à la Communauté européenne et à l'Union européenne", c'est-à-dire dans la continuité du traité de Maastricht et du pacte de stabilité. C'est cela, "l'idéal européen" ?
(semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)


Le président de la Commission européenne, Romano Prodi
"Je suis à l'écoute de ce qui se passe à Florence. Les jeunes doivent être entendus, ce qui ne veut pas dire que leurs opinions doivent toujours être partagées. En cette période de changements, la voix des jeunes est d'une grande importance. "
Comment laisser dire une chose pareille à Prodi, alors que, la veille, le représentant de l'Union européenne pour la politique étrangère, Javier Solana, avait salué "l'unité et la détermination de la communauté internationale tout entière" après le vote à l'ONU de la résolution unanime donnant carte blanche à Bush pour déclencher la guerre?
(semaine du 13 au 19 novembre 2002- n°564)


Les autorités Italiennes
– Le ministre de l'Intérieur du gouvernement Berlusconi, Giuseppe Pisanu : "Tout le mérite de la réussite du Forum social européen de Florence revient à tous ceux qui se sont employés au déroulement pacifique de la manifestation : participants, forces de l'ordre, organisateurs et autorités locales. "
– Le président de la Chambre des députés : "C'est le signe que, dans ce pays, on ne se divise pas toujours et souvent artificiellement, mais qu'il y a un sens des responsabilités pour trouver des moment unificateurs. "
(semaine du 13 au 19 novembre 2002 - n°564)

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Pourquoi la Banque mondiale aime tant la "démocratie participative"

Comment faire payer la "dette externe" qui étrangle les peuples, comment faire passer les privatisations? La Banque mondiale le dit elle–même : le "seul moyen", c'est la "démocratie participative", appliquée à très grande échelle par les amis brésiliens de Besancenot et Krivine (qui animent un des courants du Parti des travailleurs du Brésil), en particulier dans l'État brésilien de Rio Grande do Sul et dans sa capitale, Porto Alegre.
Et ces gens–là organisent chaque année, avec l'association ATTAC, un "forum social mondial" présenté comme le rendez–vous des opposants à la "mondialisation néo–libérale"!

Dans un manuel qu'elle a édité pour ses fonctionnaires, la Banque mondiale, sous le titre "Impliquer l'opposition", écrit : "Dans l'exemple des municipalités du Brésil, il est devenu évident que le seul moyen d'éviter l'annulation des prêts de la Banque était l'implication directe des habitants des bidonvilles dans la conception des projets."
La Banque mondiale le dit elle–même: le "budget participatif" est le seul moyen de garantir le paiement de la dette. Comment? En conduisant les "représentants de la population" à éliminer eux–mêmes les revendications.
Cette méthode, qui conduit à la destruction des organisations ouvrières et populaires, a été condamnée sans appel par le peuple brésilien.
"LE SEUL MOYEN D'ÉVITER L'ANNULATION DES PRÊTS DE LA BANQUE ÉTAIT L'IMPLICATION DIRECTE DES HABITANTS"
En effet, les dernières élections générales au Brésil ont vu un raz de marée pour le Parti des travailleurs et son candidat à la présidentielle, Lula. Mais, à l'inverse, les élections locales, dans l'État de Rio Grande do Sul (le Brésil est un État fédéral), se sont traduites par un recul important en voix pour les candidats du PT les plus impliqués dans le "budget participatif" .
Ainsi, Tano Genro, ancien maire de Porto Alegre (capitale de l'État), auteur d'un livre sur le "budget participatif", dont la Banque mondiale a publié des traductions, se présentait pour succéder à Olivio Dutra (PT) au poste de gouverneur de l'État.
Résultat : au premier tour, il obtient 37,25 % des voix. Au second tour, il a été battu par le candidat de droite. Quatre ans plus tôt, Olivio Dutra, le candidat du PT de l'époque, avait obtenu 45,92 % des voix au premier tour et avait été élu au second.
C'est à Porto Alegre que s'est concentrée la perte des voix : alors que le nombre de votants augmentait considérablement (plus de 16 % de votants supplémentaires dans l'État), Tarso Genro a fait perdre au PT, dans la ville qu'il avait administrée, 86 236 voix par rapport à 1998 !
BERNARD LEDUC    (semaine du 20 au 26 novembre 2002 – n°565)
(1) The World Bank Participation Sourcebook, chapter III : "Practice Pointers in Participatory Planning and Decisionmaking" ("Pratiques de planification et de prises de décisions participatives").

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ILS ONT DIT

Entendu au Forum social européen de Florence.
– Un militant de Refondation communiste, organisation pourtant favorable au budget participatif : "A Rome, avec Refondation, nous avons accepté de gérer le budget participatif, parce que nous pensions faire les choix avec la population. Mais, ensuite, avec le plan régulateur, nous nous sommes aperçus que tout était organisé par les pouvoirs économiques et que le peuple ne comptait pour rien."
– Un élu dans un conseil de quartier de Brescia : "II importe de faire attention parce que si les choses continuent avec les privatisations, le budget participatif se retrouvera à ne gérer que les entreprises privées."
(semaine du 20 au 26 novembre 2002 - n°565)

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Les généreux donateurs d'ATTAC

En 1999, ATTAC a touché 876 400 F de subventions. Qui sont les généreux donateurs pour cette année 1999 ? "ATTAC reçoit des subventions de la Commission européenne, du CNASEA (1) pour les emplois-jeunes." (Informations extraites du rapport financier 1999.)
En 2000, la récolte est plus abondante: 1 019 000 F. Parmi les donateurs : Commission européenne, 325 000 F ; municipalité de Saint-Brieuc, 50 000 F ; conseil général des Côtes-d'Armor, 50 000 F ; communauté d'agglomération de Saint-Brieuc, 30 000 F, et région PACA-ville de La Ciotat, 60 000 F ; ministère de la Culture, 200 000 F ; région PACA, 80 000 F ; La Ciotat, 10 000 ; subvention emplois-jeunes (CNASEA), 214 000 F. (Rapport financier 2000.)
En 2001, la pêche aux subventions s'avère encore plus fructueuse : 208 000 euros. Donateurs : Commission européenne, 42 000 euros ; CNASEA (emplois-jeunes), 38 000 euros ; secrétariat d'État à l'Économie solidaire, 38 000 euros ; conseil général des Bouches-du-Rhône, 38 000 euros ; région PACA, 22 000 euros ; ministère de l'Education nationale, 11 000 euros ; ministère de la Culture, 7 000 euros ; ville de Tours, 7 000 euros... (Informations extraites du rapport financier 2001.)
En 2002, le résultat n'est pas encore connu, mais les ambitions sont énormes. L'espoir de soutirer 120 000 euros (informations extraites du compte rendu du conseil d'administration des 22 et 23 août 2002) à la Commission européenne est grand. Pour cela, il suffit d'un dossier bien ficelé.
C.L.    (semaine du 20 au 26 novembre 2002 - n°565)
(1) Organisme gouvernemental français finançant les "emplois jeunes".

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Les assises nationales d'ATTAC

À LA SUITE DU "FORUM SOCIAL EUROPÉEN" DE FLORENCE

L'association ATTAC va réunir des assises nationales le 30 novembre, à La Rochelle. L'association était la principale organisatrice du "Forum social européen" qui vient de tenir à Florence (Italie).
L'hebdomadaire conservateur allemand Die Zeit (14 novembre), sous le titre "Les antimondialisations opèrent un tournant", s'est félicité de la tenue du "Forum social européen" de Florence en ces termes : "Le plus grand progrès de cette rencontre a été que les éléments radicaux et militants sont restés marginaux (...). Aux tribunes, on n'entendait plus des discours incendiaires pour l'abolition de l'OMC, de la Banque mondiale ou du FM!."
ATTAC, dans son bulletin officiel (Courrier d'information, n° 380, 19 novembre), confirme cette analyse : "Le mouvement altermondialiste en Europe n'est pas contre l'idée d'une Union européenne, mais est au contraire largement proeuropéen."
Et de se réjouir : "Au moment où la convention sur l'avenir de l'Europe (présidée par Giscard pour élaborer un projet de "Constitution" européenne - NDLR) s'apprête à confier le résultat de ses travaux aux États membres, toute une série d'alternatives largement consensuelles se dégagent. Particulièrement, l'établissement d'une Europe sociale (...)."
S'agit-il pour autant d'un "tournant", comme le dit Die Zeit? Certes, ATTAC n'hésite pas aujourd'hui à présenter l'Union européenne comme "le moteur institutionnelle plus approprié pour jeter les bases d'une mondialisation à finalité humaine" (même source). Mais dès sa création, ATTAC, sans doute plus discrètement, affichait aussi la couleur, en présentant l'euro, création du traité de Maastricht, comme "un point d'appui à la mise en place de la taxe Tobin" (1).
Peut-on, d'un côté, prétendre combattre les privatisations et, de l'autre, s'appuyer et être financé par des institutions (comme l'Union européenne) qui les organisent? Il semble que la question est désormais posée même par des adhérents d'ATTAC.
MIGUEL CRISTOBAL    (semaine du 27 novembre au 3 décembre 2002 - n°566)
(1) François Chesnais, responsable du conseil scientifique d'ATTAC, le 25 janvier 1999, lors d'un séminaire international à la Maison de l'Amérique latine, à Paris.

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L'Argentine : un modèle pour les partisans du Forum social et de la "démocratie participative"

Lors du récent Forum social de Florence, s'est tenu un "séminaire" sur le thème "Une autre entreprise est possible". Dans un document diffusé par l'une des ONG participantes, l'Alliance pour un monde responsable, pluraliste et solidaire, on pouvait lire que,
« en Argentine, un Club du troc a été fondé en 1995 et a réuni en peu de temps plus de 800 000 membres (...). Depuis plus de six ans, en Argentine, des expériences avec un autre degré d'autogestion ont démontré que la société civile désorganisée peut se réorganiser pour créer un nouveau marché sans argent conventionnel qui donne un revenu à des groupes familiaux touchés par le chômage et par la disparition du travail, au moyen de trocs multiples avec la monnaie sociale (...). D'un côté, le budget participatif crée une citoyenneté politique au-delà du système politique traditionnel dans la gestion même des fonds publics. De l'autre, les revenus du troc "réinventent" le marché à l'intérieur du système, mais à contre-courant ; partant de la solidarité et de l'autogestion, comme il est arrivé dans certains cas, et sans recourir à l'argent traditionnel. »
(semaine du 27 novembre au 3 décembre 2002 - n°566)

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LES SUITES DU "FORUM SOCIAL EUROPÉEN" EN ITALIE

Le "sacre de Cofferati…"

Cofferati, le retour… Sergio Cofferati était jusqu'il y a peu le secrétaire général de la CGIL, syndicat comparable à la CGT en France. Voici qu'il ressurgit en candidat potentiel à la présidence de la République. Il a choisi pour ce faire l'occasion d'un rassemblement, le 10 janvier, à Florence, à la suite du Forum social européen de novembre dernier. Le journal italien La Republica y a vu "le sacre de Cofferati".
Florence, Cofferati a proposé de faire renaître le plus rapidement possible l'alliance de L'Olivier (lire ci–contre) en l'élargissant. Un « projet qui ne laisse personne de côté, depuis les "antimondialisations"jusqu'à Di Pietro », un sénateur qui a été élu sur une liste de droite.
Voilà ce que Cofferati appelle "créer un front large". Un front qui va donc de l"'extrême gauche" – en passant par la gauche, le centre – jusqu'à la droite.
Pourquoi cet empressement? Depuis octobre 2001, il y a eu trois grèves générales en Italie, et en particulier celle du 16 avril 2002. Des millions de travailleurs ont imposé l'unité à tous les syndicats, CGIL, UIL et CISL, contre la suppression de l'article 18 du Code du travail (1). La majorité des travailleurs et de la population veut en finir avec Berlusconi, et ouvrir la voie à la satisfaction de ses revendications.
C'est face à cette résistance des travailleurs que Cofferati et le Forum social de Florence volent au secours de l'Union européenne et de Berlusconi en appelant à "revenir à L'Olivier de Prodi".
Rappelons que Romano Prodi est l'actuel président de la Commission de Bruxelles et qu'il était président du Conseil de 1996 à 1998. C'est lui qui a imposé notamment un budget comportant 220 milliards de francs d'économies sur les dépenses publiques, conformément aux directives du FMI pour "qualifier" l'Italie à l'euro en fonction des critères de Maastricht.
On notera que pour remettre en selle L'Olivier de Prodi, Cofferati a reçu le "soutien critique" de Refondation communiste, qui considère, par la voix de son secrétaire général, Fausto Bertinotti, qu'on peut "construire des convergences".
ALBERT DAL POZZOLO
(1) L'article 18 permet à un travailleur employé dans une entreprise de plus de 15 salariés d'être réintégré s'il a été licencié abusivement.

Qu'est–ce que L'Olivier?
C'est une coalition regroupant les Démocrates de gauche (DS, ex–Parti communiste italien), Refondation communiste (RC), à la direction de laquelle on trouve d'anciens dirigeants du PC italien et les amis locaux de Krivine et Besancenot, M. Ciampi, l'actuel président de la République (lequel était président de la Banque centrale d'Italie), et M. Dini, l'homme du FMI, qui déjà, en 1994, était ministre dans le gouvernement de Berlusconi, chargé de la "reforme" des retraites.
(semaine du 22 au 28 janvier 2003 - n°573)

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