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Le projet totalitaire de la "Constitution européenne"

À L'ORDRE DU JOUR DU CONSEIL EUROPÉEN DE SALONIQUE (20 JUIN 2003)

LES FAITS
Un projet de "Constitution européenne" doit être officiellement présenté au conseil européen de Salonique, le 20 juin. De quoi s'agit-il?
Le président de la Banque centrale européenne, Wim Duisenberg, l'explique à sa façon. Ce personnage, haut dignitaire de l'Union européenne, s'exprimant à propos des « réformes » des systèmes de retraite engagées dans plusieurs pays européens, déclare : « Il va y avoir beaucoup de protestations, mais il n'y a pas d'alternative. » Il va falloir renoncer « à des droits acquis depuis longtemps », dit-il, aussi « douloureux » cela soit-il (AFP, 12 juin).
C'est cela, cette prétendue « Constitution européenne » : face à la résistance des travailleurs et des peuples contre la destruction de leurs droits sociaux, il s'agit d'imposer définitivement un carcan faisant exploser toutes les législations nationales dans lesquelles ces droits sont inscrits, précipitant la crise sociale et politique dans tous les États membres. La préservation de ces droits, la défense de la démocratie exigent de dénoncer et de combattre ces projets. Est-il juste de les présenter ainsi? Voyons les principaux articles.

« La constitution et le droit adopté par les institutions de l'Union dans l'exercice des compétences qui lui sont attribuées ont la primauté sur le droit des États membres », proclame l'article I-10 du projet de « Constitution européenne ». Ce pouvoir exorbitant autoriserait l'Union européenne, par exemple, à exiger l'abrogation de la Sécurité sociale en France.
"PRIMAUTÉ SUR LE DROIT DES ÉTATS MEMBRES"
« Les États membres, précise cet article, prennent toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l'exécution des obligations découlant de la Constitution ou résultant des actes des institutions de l'Union. »
Des directives européennes exigent déjà l'ouverture à la concurrence, c'est-à-dire la privatisation, d'une partie du courrier postal, des chemins de fer ou des services publics d'électricité. Il ne doit y avoir aucune échappatoire, dit ce projet de « Constitution ».
« Il n'y a aucune alternative », martèle, on l'a vu, le président de la Banque centrale européenne à propos des retraites. N'est-ce pas là la preuve que cette prétendue Constitution est dirigée contre les masses laborieuses? Tout Code du travail national, tout droit national au sens large devraient s'effacer devant les décisions de l'Union européenne.
Ce principe de « primauté » du droit européen, qui était jusqu'à présent une jurisprudence de la Cour de justice européenne, s'inscrirait désormais dans le marbre d'une « Constitution » : un pas serait franchi, octroyant des pouvoirs permanents d'une nature quasi dictatoriale, niant toute notion de souveraineté des peuples d'Europe.
C'est Bruxelles qui déciderait, point final.
L'Union européenne se place ainsi au-dessus des droits et garanties arrachés par la lutte de classe, pour y substituer - nous y reviendrons - une prétendue « société civile » où patrons, travailleurs, Églises, ONG diverses seraient censés partager un même intérêt général et où, dans les faits, ouvriers, paysans, petites gens n'ont plus leur mot à dire.
Au nom de quoi et dans quels buts? « Les États membres et l'Union agissent dans le respect du principe d'une économie de marché ouverte, où la concurrence est libre », répond l'article III-67. Le « marché », c'est-à-dire le capital financier, les multinationales - doit ne rencontrer aucun obstacle.
Et ils prétendent « avoir élaboré la présente Constitution au nom des citoyens d'Europe » (préambule du projet) !
YAN LEGOFF    (semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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ILS ONT DIT

LA CES : "DES AVANCÉES"
La bien mal-nommée « Confédération européenne des syndicats » (CES), qui a corédigé le projet de « Constitution européenne » s'en est félicitée en ces termes, le 13 juin : « Par rapport aux exigences posées par le mouvement syndical, des avancées ont été réalisées, avec toutefois des limites évidentes. » Et de saluer « la reconnaissance du rôle des partenaires sociaux et du dialogue social, résultat positif », en concluant : « S'adressant à notre congrès de Prague, le président Valéry Giscard d'Estaing nous a parlé d'une "Constitution démocratique, moderne et sociale". Pour le social au moins, des efforts restent à faire. »
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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RAFFARIN : "HISTORIQUE"
Jean-Pierre Raffarin a « félicité » Valéry Giscard d'Estaing, président de la Convention ayant élaboré le projet de « Constitution européenne ».
Évoquant sa « joie profonde », il a déclaré : « La France approuvera les conclusions de la Convention. C'est une étape historique » (AFP, 14 juin).
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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LE PS : "UNE CONSTITUTION LÉGITIME"

La dernière lettre de la délégation du PS au Parlement européen (n° 7) consacre son dossier à la Convention européenne et au projet de « Constitution » sous le titre : « Une Constitution légitime des citoyens européens et des États membres. »
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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LE PCF POUR "UNE VRAIE ET NOUVELLE AMBITION"

Pour le PCF, « puisque nouveau traité il va y avoir, alors, il faut en faire un processus démocratique et mettre en débat public son contenu », lit-on dans La Revue (mars 2003), mensuel édité à destination des militants de ce parti.
Dans cette publication, Sylviane Ainardi, députée européenne du PCF, déclare que « le problème n'est pas de rajouter un peu, ou même beaucoup de social et de démocratique à la construction européenne, mais d'avoir une vraie et nouvelle ambition pour elle ».
Et de prôner « l'intervention directe des associations représentatives des citoyens et des syndicats, (qui) doivent être associés à l'élaboration des orientations et des directives européennes ». Dans ce cadre, poursuit la députée du PCF, « l'équilibre institutionnel actuel entre Commission, Conseil des ministres et Parlement européen par le processus de codécision doit être conservé ».
« L'approche euroconstructive a marqué »
le PCF, commente cette revue interne. C'est le moins qu'on puisse dire!
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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APERÇU DE QUELQUES ARTICLES DU PROJET DE LA « CONSTITUTION EUROPÉENNE »

Des "lois européennes directement applicables".

L'article I-32 définit les « actes juridiques de l'Union » : loi européenne, loi-cadre européenne, règlement européen, décision européenne, recommandation et avis.
La loi européenne, tout comme le règlement et ta décision, « est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre ». Il ne serait même plus besoin de Parlements nationaux pour transposer les ordres de Bruxelles!
La loi-cadre européenne (correspondant aux anciennes « directives ») « lie tout État membre quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant au choix de la forme et des moyens ».
Vous êtes trop bon, monseigneur...
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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Une "Constitution" ouvertement cléricale

Il n'y aurait, s'indignent les Églises, aucune référence à Dieu dans le projet de Constitution européenne. En fait, ayant déjà eu la main, elles veulent le bras tout entier. Le préambule du projet de Constitution déclare en effet "s'inspirer des héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe". La religion comme inspiratrice de l'organisation des pouvoirs publics? C'est l'inverse de la démocratie et de la laïcité, le fait de croire et de ne pas croire relevant de la sphère privée.
Pire, l'article I-51 établit même une relation institutionnelle avec les religions : « En reconnaissance de leur identité et de leur contribution spécifique, l'Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces Églises (…).»
(semaine du 18 au 24 juin 2003 - n°594)

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"Il n'y aura plus d'État souverain" (le président tchèque)

Pour le président tchèque, Vaclav Klaus, le projet de Constitution européenne, n'est pas que « le passage du Rubicon après lequel il n'y aura plus d'États souverains..., et tout sera décidé par un pouvoir lointain à Bruxelles » ; un diplomate polonais cité par Libération ajoutant pour sa part : « Tout notre argumentaire pendant la campagne pour le référendum d'adhésion en juin a été d'expliquer aux électeurs qu'il n'était pas question de se faire absorber par un super-État fédéral, et que les intérêts polonais étaient bien protégés par le traité de Nice. »
A quoi il leur a été répondu ce samedi 4 octobre, à Rome, par Berlusconi : « Je comprends l'intérêt de l'Espagne et de la Pologne à rester sur la décision du traité de Nice, mais je rappelle que l'intérêt européen n'est pas la somme des intérêts particuliers de chaque pays. » Chirac ajoutant pour sa part à propos du désaccord sur le nombre e membres de la Commission : « Il y a confusion : la Commission a vocation à représenter l'Europe, et pas les États membres. »
On voit, à travers ces déclarations, le fond : la Constitution européenne vise à remettre en cause tout ce qui reste de souveraineté des États membres.
(semaine du 8 au 14 octobre 2003 - n°610)

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Quelques extraits des interventions du secrétaire national du PT

VU À LA TÉLÉ
Cela faisait 18 mois que le Parti des travailleurs n'avait pas été invité sur un plateau de télévision. Précisons qu'il s'agissait d'une émission de 25 minutes sur une chaîne régionale, uniquement diffusée sur l'Ile-de-France, un dimanche midi, où étaient également présents Pierre Lellouche (UMP), Jean-Christophe Lagarde (UMP), Maxime Gremetz (PCF), Henri Weber (PS), ArIette Laguiller (LO) et Alain Krivine (LCR).
"Jusqu'à quand la politique de l'Europe va-t-elle aboutir au fait qu'on ferme les usines ?"
Daniel Gluckstein : « Il y a en ce moment, à l'heure où nous parlons (émission enregistrée le jeudi 2 octobre), une manifestation de milliers d'ouvriers à Charleville-Mézières, avec tous leurs syndicats, parce qu'on a fermé toutes les entreprises dans ce bassin d'emploi. Il s'en passe comme cela dans toutes les régions de France.
Alors, au lieu d'amuser la galerie, il y a une question à laquelle il faudrait répondre : jusqu'à quand on va laisser ce pays se désertifier? Jusqu'à quand la politique de l'Europe va-t-elle aboutir au fait qu'on ferme les usines, qu'on supprime les services publics et que ce pays devient un véritable désert?
Ce débat nous intéresse. »
"Cette Constitution européenne, personne n'en parle"
Daniel Gluckstein : « Il y a quelque chose qui m'étonne. Dans moins de huit mois, on va adopter une Constitution européenne. Personne n'en parle. Cette Constitution européenne (Henri Weber, PS : « Personne ne la connaît! »), elle est rendue publique et elle stipule que, si elle passe, toutes les lois européennes s'appliqueront sans passer par l'Assemblée ou le Sénat.
Comment peut-on nous parler d'une politique différente de gauche et de droite si tout est cadré par la Constitution européenne? Je voudrais comprendre ce mystère. »
Maxime Gremetz (PCF) : « Sur le plan juridique, il a parfaitement raison. »
Pierre Lellouche (UMP) : « C'est d'ores et déjà le cas. »
Daniel Gluckstein : « Non. Il y a encore une transposition par le Parlement, qui n'existera plus. »
Maxime Gremetz (PCF) : « Il a raison de dire que c'est un nouveau carcan qui est posé sur le Parlement français, sur notre pays, sur la démocratie sociale, pour empêcher notre peuple de choisir librement son destin. »
"Vous parlez de République? Mais vous êtes en train de la liquider !"
Paul Wermus : « François Hollande a dit : "Nous devons être impitoyables avec l'extrême gauche. L'extirême gauche n'offre aucun espoir et ne crée pas de dynamique". » Daniel Gluckstein : « Je suis venu ici avec des camarades de l'entreprise Alstom. Il y a 7 000 suppressions d'emplois aujourd'hui, décidées par l'Europe. Mais ces mêmes camarades de l'usine Alstom, à l'époque de la gauche plurielle, sont allés en délégation chez M. Gayssot, chez M. Bartolone, chez M. Pierret, et tous leur ont dit la même chose : on ne peut pas s'opposer aux licenciements, parce que c'est l'Europe de Maastricht. C'est un fait. Ce que je constate, c'est qu'aujourd'hui, et je le regrette, qu'il se soit agi de la gauche plurielle hier ou du gouvernement de droite, l'application de la politique de l'Europe conduit ce pays à un désert industriel. M. Lellouche a parlé de République? Mais vous êtes en train de liquider la République avec votre Constitution européenne. »
"Le PCF va-t-il appeler à voter non à la Constitution européenne ?"
Daniel Gluckstein : « Est-ce que le Parti communiste français va appeler à voter non à la Constitution européenne ?
Maxime Gremetz, député du PCF : Absolument, absolument.
D. G. : Le Parti communiste français ne fera pas d'alliance avec des partis qui soutiennent la Constitution européenne ?
M. G. : Je ne suis pas à l'école. Je n'aime pas les professeurs.
D. G. :Je ne suis pas un professeur. Je suis un militant. Je pose une question.
(Chahut.)
D. G. : Où est la réponse? Il n'y aura pas de réponse...
(semaine du 8 au 14 octobre 2003 - n°610)

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La "Constitution européenne" veut faire appliquer les directives de Bruxelles par les syndicats !

PRÉSENTATION
Subsidiaires
La discussion du projet de budget 2004 présenté par le gouvernement va commencer à l'Assemblée nationale, dans un cadre imposé par Bruxelles. La Commission européenne a déjà indiqué ses exigences, assorties de menaces de sanctions financières : « Si le gouvernement français croit qu'il suffit de réduire son déficit structurel de 0,6 point de PIB (1) et des promesses pour après, il se trompe », lance le commissaire européen Pedro Solbes (Le Monde, 12 octobre). « Il faut faire clairement plus. Au lieu des 0,6 % annoncés, il va falloir faire un effort d'environ 1 % du PIB (...). Nous avons besoin de garanties. »
Insuffisante, la suppression de 10000 postes d'enseignants, d'agents de l'Equipement et des Financ s! Insuffisante, l'institution d'une taxe de 2,5 centimes d'euro sur le gazole! Insuffisantes, l'augmentation de 22 % du forfait hospitalier, la diminution des r mboursements de centaines de médicaments! Insuffisante, la diminution des allocations des chômeurs en fin de droits!
Il faudrait, pour Bruxelles, l'équivalent de 6 milliards d'euros de coupes supplémentaires. Où les trouver? « Ma responsabilité est de faire respecter le pacte, mais la politique budgétaire reste du ressort des États membres », répond avec cynisme le commissaire européen, lançant tout de même quelques pistes (lire ci-contre). On a là une illustration précise de la notion de « subsidiarité » reprise dans le projet de « Constitution » européenne.
Et comme nous le montrons dans cette page, cette « Constitution » entend traiter de la même façon les organisations syndicales, en en faisant de véritables « colégislateurs » des directives de Bruxelles! Rupture avec l'Union européenne, non à son projet de « Constitution » !
YAN LEGOFF    (semaine du 15 au 21 octobre - n°611)
(1) Le produit intérieur brut (PIB) de la France était, en 2002, de 1 520 milliards d'euros. 1 % du PIB représentent donc 15 milliards d'euros.

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(SUITE)

LE DÉMANTÈLEMENT D'ALSTOM, EN COMMENÇANT PAR 7000 SUPPRESSIONS D'EMPLOIS, C'EST BRUXELLES QUI L'A IMPOSÉ. LES PRIVATISATIONS EN COURS OU ANNONCÉES D'AIR FRANCE, D'EDF, DE FRANCE TÉLÉCOM, DU TRANSPORT FERROVIAIRE, CE SONT ENCORE DES DIRECTIVES EUROPÉENNES. LE PROJET DE « CONSTITUTION » EUROPÉENNE CONSACRE CETTE INGÉRENCE DESTRUCTRICE, EN VOULANT Y INTÉGRER ÉTROITEMENT LES SYNDICATS.

« Un État membre peut confier aux partenaires sociaux la mise en œuvre des lois-cadres européennes (nouvelle appellation des directives européennes - NDLR) », proclame l'article III-104 du projet de « Constitution » européenne. Il faudrait donc que les syndicats coorganisent les privatisations, les restructurations et le démantèlement des Codes du travail et des régimes de protection sociale.
Selon Bruxelles, Il faut, par exemple, « concevoir, introduire et appliquer effectivement des réformes des systèmes de retraite (...), accroître la capitalisation et, si nécessaire, améliorer l'accès aux régimes de retraite complémentaire » (1). « Il faudrait chercher d'ici 2010 à augmenter progressivement d'environ cinq ans l'âge moyen effectif auquel cesse, dans l'Union européenne, l'activité professionnelle » (2).
Concernant la Sécurité sociale, il faudrait « enrayer la spirale des dépenses dans le secteur de la santé et ramener leur évolution à un niveau plus supportable, et, le cas échéant, adopter de nouvelles mesures pour atteindre cet objectif » (3).
Les « partenaires sociaux » devraient donc se voir « confier la mise en œuvre » de toutes ces mesures, qui comprennent également : « Promouvoir une organisation du travail plus souple et revoir la législation du marché du travail, notamment celle relative aux contrats de travail ». (4)
Il est aussi prévu (article III-106 du projet de « Constitution ») qu'au niveau européen, la commission fasse corédiger ses projets par les « partenaires sociaux » eux-mêmes (voir ci-dessous) !
Le projet de « Constitution », en ce domaine, s'inspire du traité d'Amsterdam, signé en octobre 1997 (merci la « gauche plurielle » !).
La prétendue Confédération européenne des syndicats (CES) a ainsi, déjà, corédigé avec le patronat européen les directives sur les contrats à durée déterminée ou le télétravail. Inclure ces dispositions totalitaires dans le marbre d'une prétendue « Constitution », qui aurait « la primauté sur le droit des États membres » (article 10), signifierait le basculement dans une autre société. Il faut le dire clairement : ce type de régime, qui nie l'indépendance des organisations ouvrières, qui les intègre dans les rouages de l'État, porte un nom, celui de corporatisme, auparavant revendiqué par le maréchal Pétain en France, par Franco en Espagne ou par Mussolini en Italie. Il s'agit, en l'occurrence, d'un projet néocorporatiste supranational.
Ce ne sont pas seulement des décennies de conquêtes ouvrières inscrites dans les législations nationales qu'ils voudraient rayer d'un trait. C'est la démocratie même qui est en jeu, et, avec elle, l'existence d'organisations syndicales indépendantes dans tous les pays européens.
(1) Grandes orientations de politiques économiques 2003-2005, Commission européenne, avril 2003.
(2) Conseil européen de Barcelone, mars 2002.
(3) Grandes orientations de politiques économiques 2003-2005, Recommandations à la France, Commission européenne.
(4) Grandes orientations de politiques économiques 2003-2005.
(semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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PREUVES A L'APPUI

ARTICLE III-104 :
Des syndicats transformés en relais des directives européennes
Le projet de « Constitution » européenne encourage à faire transposer les directives européennes (rebaptisées « lois-cadres européennes ») par les organisations syndicales elles-mêmes. L'article III-104, paragraphe 4, établit en effet qu' « un État membre peut confier aux partenaires sociaux, à leur demande conjointe, la mise en œuvre des lois-cadres européennes (...). Dans ce cas, il s'assure que, au plus tard à la date à laquelle une loi-cadre européenne doit être transposée, les partenaires sociaux ont mis en place les dispositions nécessaires par voie d'accord (...).»
Et si les organisations syndicales, finalement, refusent, « l'État membre concerné (devra) prendre toute disposition nécessaire lui permettant d'être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par ladite loi-cadre ». Quoi qu'il arrive, la « loi-cadre européenne » devra, de toute façon, être transposée!
ARTICLES III-105 ET III-106 :
Les "partenaires sociaux" Institués en scribes de la Commission européenne
Selon l'article III-105, « la Commission, avant de présenter des propositions dans le domaine de la politique sociale, consulte les partenaires sociaux (...) sur le contenu de la proposition envisagée (...). A l'occasion de cette consultation, les partenaires sociaux peuvent informer la Commission de leur volonté d'engager le processus prévu à l'article III-106. La durée de la procédure ne peut pas dépasser neuf mois, sauf prolongation décidée en commun par les partenaires sociaux concernés et la Commission. »
Ce que prévoit l'article III-106, c'est que des « accords » conclus dans ce cadre entre « partenaires sociaux », au niveau européen soient « mis en œuvre » par « des règlements ou des décisions européens adoptés par le Conseil des ministres sur proposition de la Commission ».
Autrement dit : la Commission informe « les partenaires sociaux » de son intention de légiférer, et ces derniers peuvent, dans le cadre des objectifs définis au point de départ par la Commission, décider de conclure un « accord », qui pourra avoir valeur, sous réserve du vote du Conseil des ministres européens, de décisions de l'Union européenne...
UNE PREMIÈRE APPLICATION : L'accord sur la formation professionnelle
L'accord signé en France le 20 septembre entre les syndicats et le patronat sur « la formation tout au long de la vie professionnelle », qui rompt le cadre collectif des droits, faisant reporter la responsabilité sur le salarié de son « employabilité », reportant la formation hors du temps de travail, consacrant la notion patronale de « compétences », s'inscrit explicitement dans le cadre « des initiatives européennes en la matière ».
Le projet de « Constitution » européenne inclut d'ailleurs un chapitre entier sur la question (nous y reviendrons). L'accord du 20 septembre contient en outre cette disposition : « Les parties signataires du présent accord demandent à être associées à la préparation des dispositions législatives et réglementaires nécessaires à la mise en œuvre du présent accord. » Nous sommes en plein dans la colégislation.
LA CES, PARTENAIRE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE :
La prétendue Confédération européenne des syndicats (CES) est l'interlocuteur syndical unique et institutionnel de la Commission européenne. Elle est réputée représenter toutes les confédérations nationales. La CES s'est prononcée pour le traité de Maastricht, pour l'euro. Et elle vient d'annoncer qu'elle défendra bec et ongles le projet de « Constitution européenne ».
Son secrétaire général, John Monks. a déclaré à Rome, le 4 octobre dernier : « La nouvelle Constitution pour l'Europe doit refléter (les) valeurs (de l'Europe sociale). C'est le cas du projet rédigé par la Convention. J'adresse le message suivant aux dirigeants des Etats-nations alliés aux forces sombres du conservatisme : bas les pattes devant ce projet! »
Dans un mémorandum déposé le 18 septembre lors d'une entrevue auprès du président du Conseil italien, SilvioBerlusconi, la CES écrit que « la Convention européenne a présenté un avant-projet de traité constitutionnel, qui (...) représente un remarquable pas en avant ».
(semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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PROJET DE "CONSTITUTION" EUROPÉENNE

Dans la "Charte des droits fondamentaux", dix directives destructrices des droits

La Charte des droits fondamentaux, proclamée en décembre 2000 au sommet de Nice, constitue la partie Il du projet de Constitution européenne élaborée par la Convention présidée par Giscard. Son intégration dans ce projet de Constitution est la première raison qui a amené la CES à y voir « un remarquable pas en avant ». Il semble nécessaire d'apporter une précision capitale sur cette charte.
La Charte des droits fondamentaux se présente sous la forme de 52 articles au langage délibérément flou : « Droit de négociation, droit à des conditions de travail respectant la santé et la sécurité, interdiction du travail des enfants... »
Bien sûr, aucune de ces formulations ne s'appuie sur la préservation et "la garantie du respect des articles précis des Codes du travail existant dans chaque pays. Mais elle ne dit pas non plus .explicitement le contraire.
Mais la Convention de Giscard a fait un ajout à la charte. Le député UMP Pierre Lequiller, membre de la Convention et auteur d'un rapport d'information, indique : « La Convention a explicitement mentionné, dans le préambule de la charte, que les commentaires du présidium de la Convention chargé d'élaborer la charte (rédigée en 2000 - NDLR) lieront les juridictions nationales et communautaires dans leur interprétation des dispositions de ce texte. » Ces commentaires auront donc maintenant une valeur juridique.
Il y a donc la Charte des droits fondamentaux avec de grandes formules abstraites, et il y a les précisions concrètes ayant maintenant valeur juridique constitutionnelle.
LE TRAVAIL DES ENFANTS AUTORISÉ EN STAGE DÈS L'ÂGE DE 13 ANS
Informations ouvrières de la semaine dernière a montré que, pour deux des articles de cette charte, les commentaires juridiques s'appuyaient explicitement sur deux directives européennes sur les licenciements et l'aménagement du temps de travail, qui remettent en cause les droits nationaux arrachés par la lutte de classe.
Mais il y a huit autres directives européennes, et non des moindres, qui sont citées comme la base juridique de la Charte des droits fondamentaux :
- La directive 76/207/CEE relative à l'égalité entre hommes et femmes, celle au nom de laquelle l'Europe a imposé le rétablissement du travail de nuit des femmes dans l'industrie.
- La directive 98/59/CE sur les licenciements collectifs (du même type que celle citée la semaine dernière dans le journal).
- La directive 94/45/CE sur les comités d'entreprise européens, qui impose aux délégués qui y siègent la confidentialité sur les plans de licenciements et remet en cause la souveraineté des organisations syndicales nationales.
- La directive 80/987/CEE sur la protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'entreprise, qui complète celle citée la semaine dernière dans le journal.
- La directive 89/391/CEE sur la santé au travail, qui remet en cause la responsabilité a priori de l'employeur en cas d'accident du travail.
- La directive 94/33/CE sur la protection des jeunes au travail, qui est en fait celle qui a autorisé, au nom de « dérogations », le travail des enfants en stage dès l'âge de 13 ans.
- La directive 92/85/CEE sur les femmes enceintes, qui, transposée ensuite, a remis en cause l'interdiction absolue du licenciement des femmes pendant leurs congés de maternité.
- La directive 96/34/CE sur le congé parental, qui a préparé la disposition de la loi Fillon sur les retraites remettant en cause les bonifications d'années entières de cotisation par enfant pour les femmes.
Qui, parmi les défenseurs de cette Charte des droits fondamentaux, vous a informé à ce sujet?
Informations ouvrières étudiera toutes ces directives européennes, ainsi que d'autres aspects des commentaires du présidium, afin de dévoiler la mystification de cette Charte des droits fondamentaux.
DANIEL SHAPIRA     (semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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ILS ONT DIT

– VALÉRY GISCARD D'ESTAING, président de la Convention qui a rédigé le projet de « Constitution » européenne : « Il n'y a pas d'alternative, (car) le projet de Constitution n'est pas un compromis, c'est la solution unique » (7 octobre).
– HUBERT VÉDRINE, ancien ministre (PS) des Affaires étrangères : « Il faudra un référendum et le gagner. » Il a mis en garde contre le risque de « détricotage complet du projet Giscard », qu'il estime être « le meilleur résultat possible »(8 octobre).
– JEAN-PIERRE RAFFARIN, Premier ministre : « Il faudra un référendum », même si cela représente « un risque politique énorme » (9 octobre). L'AFP rappelle à cette occasion l'échec du référendum en Corse et ajoute : « Une initiative étonnante de la part d'un chef de gouvernement toujours très soucieux de ne pas marcher sur les plates-bandes du président Chirac (...). A ce jour, le chef de l'État n'a pas arrêté son choix entre la consultation populaire et la voie parlementaire. »
– ELISABETH GUiGOU (PS) : « Il ne faut pas toucher aux deux premières parties (du projet de « Constitution »), la partie institutionnelle et l'intégration de la Charte des droits fondamentaux. C'est ce qu'on a fait de mieux depuis le traité de Rome de 1957 » (10 octobre).
– FRANÇOIS HOLLANDE, premier secrétaire du PS : « Le choix de l'euro (a été) un choix judicieux pour la France (...). Je veux pouvoir voter pour une bonne Constitution européenne » (10 octobre).
Au conseil national du PS, 40 % des voix se sont portés sur un texte titré : « En attendant, c'est non. » Commentaire de Hollande : « Le PS, le tout ou rien, le oui tout de suite ou le non toujours » (11 octobre).
(semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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Bruxelles au gouvernement français : " Il nous faut des engagements et un calendrier de réformes précis"

Le commissaire européen Pedro Solbes, exigeant 6 milliard de coupes supplémentaires dans le projet de budget du gouvernement français a lancé quelques pistes : « La France doit faire des réformes structurelles détaillées dans les grandes orientations de politique économique (GOPE). Un pas a été fait sur la réforme des retraites, nous demandons de réformer le système d'assurance-chômage, celui de la santé. Le gouvernement français sait très bien les réformes qui sont nécessaires, et il y travaille (...), mais il nous faut des engagements et un calendrier de réformes précis ».(Le Monde, 12 octobre).
Et c'est cela que, selon le projet de « Constitution » européenne, les syndicats devraient « mettre en œuvre »!
(semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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LA CAMPAGNE POUR LE "NON" EST ENGAGÉE !

Amis et camarades, les initiateurs de la manifestation vous soumettent cet appel. Nous vous invitons à le signer. Faites parvenir, dès ce soir, votre signature aux organisateurs. E-mail : republique.indivisible@fr.oleane.com
Appel du 20 septembre
Le 20 septembre, nous nous sommes rassemblés pour la défense de l’unité et l’indivisibilité de la République. Venus de tout le pays, 10 000 citoyens, élus de la République, travailleurs de toutes corporations des villes et des campagnes, jeunes, militants de toutes tendances nous avons manifesté de Nation à La République. Ensemble nous avons exprimé le refus de la régionalisation qui disloque l’unité du pays et des droits.
La République est en danger
Le 17 mars 2003, un vote du congrès a modifié l’article 1 de la Constitution. “ L’organisation de la République est décentralisée ” : cette brèche ouverte, le processus d’éclatement de la République s’accélère.
Des dizaines de milliers de fonctionnaires de l’Education nationale sont transférés aux régions, les mesures de régionalisation de la santé, des transports ferroviaires se succèdent, les fermetures de bureaux de poste, de trésoreries publiques sont programmés en masse. Une loi organique autorise les collectivités territoriales “ à déroger aux dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’exercice de leurs compétences ”.
Traduisant cette révision constitutionnelle, un projet de loi sur la “ décentralisation ” prévoit de transférer aux régions ou aux collectivités territoriales la totalité de la formation professionnelle, la gestion des routes, des ports, des aéroports, du logement. “ L’achèvement ” de la remise en cause des 36 000 communes en imposant par la loi l’intercommunalité forcée est également présente dans ce texte. Il doit être présenté à l’Assemblée nationale au mois de décembre.
Comment ne pas voir que sont ainsi remises en cause les règles, lois, droits et acquis communs pour tous les citoyens sur l’ensemble du territoire de la République ? Comment ne pas constater que l’on détruit ainsi le fruit d’années de lutte du mouvement ouvrier et de la démocratie ?
Qui ne voit qu’avec ce processus de régionalisation la dislocation de la Nation se prépare ?
L’avenir du pays est en jeu.
Travailleurs, citoyens, il faut savoir et faire savoir que ces projets réactionnaires se relient au projet de prétendue “ Constitution européenne ”. Il devrait être définitivement approuvé par la conférence intergouvernementale en juin 2004 et soumis à “ ratification ”, dans chaque pays, d’ici fin 2004. On peut y lire : “ La constitution et le droit adopté par les institutions de l’Union européenne dans l’exercice des compétences qui lui sont attribués ont la primauté sur le droit des États membres. ” (article 10). “ La loi européenne est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre. (...) La décision européenne est obligatoire dans tous ses éléments. ” (article 32).
La constitution instaure ainsi la primauté des institutions européennes sur les institutions nationales, instaure “ des lois européennes ” dans des domaines aussi vastes que les marchés intérieurs, la pêche, l’agriculture, les transports, l’énergie... Si un tel projet voyait le jour, c’en serait fini de toute souveraineté des nations.
Aucune loi progressiste ne pourrait plus être adoptée par les Parlements nationaux.
L’Union européenne, la Banque centrale européenne, auraient tous les pouvoirs pour s’y opposer. Ce projet permettrait à l’Union européenne de réaliser un de ses vieux rêves : en finir avec la laïcité institutionnelle de l’Etat et de l’école dans notre pays.
Avec cette prétendue “ constitution européenne ”, les régions seraient mises en relation directe avec les autorités de Bruxelles, cela tant sur le plan réglementaire que financier. C’est l’éclatement de la nation, c’est l’éclatement de toutes les nations en Europe, c’est la balkanisation et demain le règne des potentats locaux et le développement de la maffiosisation de l’économie et de toute la société.
Cela au moment même où le pays connaît une vague de désindustrialisation sans précédent. Et l’on voit avec les développements à Alstom ce qu’est la politique de l’Union européenne. Qu’importe les 110 000 emplois menacés pourvu que soient respectés les critères de convergence de Maastricht. Où veulent-ils emmener le pays ? Où veulent-ils emmener tous les pays ?
Construisons le mouvement du “non” à la “Constitution européenne”
Notre refus de ce projet ne peut être que total. Nous refusons la notion même de “ constitution européenne ”. L’urgence est de dire non.
Il est encore temps de mobiliser, dans l’unité la plus large, l’ensemble des forces de la démocratie, pour mettre en échec ces projets funestes et dangereux.
Aujourd’hui 20 septembre, nous faisons le serment de tout faire afin de défendre les fondements de la République, son indivisibilité et son unité.
La loi de régionalisation, de transfert des compétences, soumise au Parlement en décembre doit être rejetée. Dans tout le pays, tenons meeting et réunions publiques, multiplions les délégations aux députés, développons toutes les initiatives nécessaires pour s’opposer au vote de cette loi.
A tous nous proposons d’engager dans les villes et les campagnes, dans les entreprises et les localités, auprès des élus, auprès de la population le travail d’information sur la “ constitution européenne ”, projet totalitaire remettant en cause la souveraineté nationale et la démocratie détruisant les droits, conquêtes et garanties arrachés dans le cadre de la République une et indivisible.
Ensemble agissons pour que se construise le mouvement du peuple et de la démocratie qui dira “ non ” à la “ constitution européenne ”, oui à l’unité et l’indivisibilité de la République, oui aux droits égaux pour tous sur l’ensemble du territoire, oui à l’égalité des droits des citoyens devant la loi.
Pour toute correspondance : F. Livart, 13, rue M. Borreau 93500 PANTIN e-mail : republique.indivisible@fr.oleane.com - Soutien financier : chèque à l’ordre de “République une et indivisible”

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