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LE PROJET DE "CONSTITUTION EUROPÉENNE"

Pourquoi le MEDEF applaudit à la "Charte européenne des droits fondamentaux"

ARGUMENTAIRE
Pour le MEDEF, le projet de « Constitution européenne » présenté au Conseil européen de Salonique, le 20 juin, est « incontestablement une bonne nouvelle ». « D'abord, parce que l'Union européenne va ainsi donner force constitutionnelle à la "Charte des droits fondamentaux" », se félicite cette organisation, dans sa Newsletter du 17 juin.
Que les dirigeants patronaux applaudissent à des droits ou prétendus tels, voilà qui devrait alerter toute personne de bonne foi. À la lecture de cette « charte », qui constitue la partie II du projet de « Constitution européenne », on comprend enfin l'enthousiasme de M. Seillière.

Prenons l'article II-31, intitulé « Conditions de travail justes et équitables » : « 1. Tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité.» Quel patron dira le contraire? Lorsque les capitalistes, en France, faisaient travailler plus de douze heures par jour des enfants de huit ans et moins, c'était pour leur bien, disaient–ils, bien évidemment…
Poursuivons : « 2. Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés. »
Vous êtes trop bon, Monseigneur. Le travailleur a « droit » à une limitation maximale de la durée du travail : huit heures, dix heures, douze heures ou plus? Il a « droit », aussi, à un repos journalier : c'est sûr, les journées n'ont que 24 heures!
Dans sa grande mansuétude, l'Union européenne nous accorde m&ecicrc;me le « droit » à un repos hebdomadaire (d'une demi–journée, d'un jour, de deux jours? à n'importe quel moment de la semaine ?) et même « à une période annuelle de congés payés » (cinq, quatre, trois semaines? moins ?). De qui se moquent–ils? Le pire patron négrier, en France, en Europe ou dans n'importe quelle « zone franche » du monde, signerait des deux mains une telle « charte » pour ses ouvriers.
De plus, ce projet de « Constitution européenne » proclame, dans son article I–10, que cette « Constitution et le droit adopté par les institutions de l'Union dans l'exercice des compétences qui lui sont attribuées ont la primauté sur le droit des États membres ». Ce qui signifie que tout Code du travail, toute convention collective, tout statut national devrait s'effacer devant cette prétendue « Charte des droits fondamentaux » !
" Un progrès remarquable", selon la CES
Qui pourrait accepter une chose pareille? La CFDT, dans un communiqué du 23 juin, « se félicite de l'adoption par les chefs d'État du projet de Constitution de l'Europe (…). Ce projet de Constitution reprend un certain nombre de demandes syndicales : il prévoit l'intégration de la Charte européenne des droits fondamentaux dans la Constitution, ce qui renforcera leur application ».
Mais la CFDT, en l'occurrence, reprend totalement à son compte l'orientation de la mal–nommée Confédération européenne des syndicats (CES), dont sont membres toutes les confédérations syndicales françaises.
La CES a participé à la « Convention européenne » qui a rédigé le projet de « Constitution ». Émilio Gabaglio, représentant de la CES à cette convention, a déclaré le 13 juin : « L'intégration avec valeur légale de la Charte des droits fondamentaux dans le traité représente un progrès remarquable. » Giscard d'Estaing, président de la Convention européenne, a même été invité par la CES, lors de son dernier congrès, à Prague, le mois dernier (voir Informations ouvrières, n° 592).
Giscard n'a pas été avare d'éloges : « Je vous remercie de votre aide à la réalisation d'une Constitution moderne et sociale, pour les Européens et pour l'Europe. »
Un syndicat, la CES?
Y.L.    (semaine du 25 juin au 1er juillet 2003 – n°595)

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Charte européenne des droits fondamentaux : ce qu'on vous cache

DEUX EXEMPLES
On entend dire que la Charte européenne des droits fondamentaux serait un point d'appui pour les travailleurs. Cette charte constitue la deuxième partie du projet de « Constitution » européenne. Or ses 54 articles tiennent en 14 pages (préambule compris). Et ils auraient, comme tout le reste de ce projet de « Constitution », « la primauté sur le droit des États membres » (article 10), donc, y compris sur tous les odes du travail, les conventions collectives, les statuts nationaux! Un point d'appui? Ou un instrument de déréglementation généralisée? Prenons deux exemples.
1. légalise des journées de treize heures de travail !
Article II-31, 2e paragraphe : « Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés. »
Remarquable précision! C'est, on en conviendra, la légalisation de l'exploitation sans limite. « La charte sera interprétée par les juridictions de l'Union et des États membres en prenant dûment en considération les explications établies sous l'autorité du présidium de la Convention qui a élaboré la charte », précise le préambule.
Ces « explications » indiquent que ce paragraphe « se fonde sur la directive 93/104/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ». Or voici ce que dit l'article 3 de cette directive 93/104/CE : « Repos journalier. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de vingt-quatre heures, d'une période minimale de repos de onze heures consécutives. »
Oui, vous avez bien lu : selon cette « Constitution » européenne, la norme devrait être des journées de treize heures de travail!
2. "Justifier" les licenciements, si c'est le patron qui le dit !
Article II-30 : « Tout travailleur a droit à une protection contre tout licenciement injustifié, conformément au droit de l'Union et aux législations et pratiques nationales. »
Qui décide qu'un licenciement est « injustifié » ? Les « explications du présidium » invitent à se reporter à la « directive 2001/23/CE sur la protection des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises ». Ce que nous avons fait.
Voici ce que dit l'article 4 de cette directive : « Le transfert d'une entreprise, d'un établissement ou d'une partie d'entreprise ou d'établissement ne constitue pas en lui-même un motif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire. Cette disposition ne fait pas obstacle à des licenciements pouvant intervenir pour des raisons économiques, techniques ou d'organisation impliquant des changements sur le plan de l'emploi.» Les patrons n'ont vraiment que l'embarras du choix!
Et la bien mal nommée Confédération, européenne des syndicats (CES) ose « saluer » « l'intégration, avec valeur juridique, de la Charte des droits fondamentaux dans le traité (...) comme contribuant positivement à renforcer la dimension sociale de l'Union européenne » !
(semaine du 8 au 14 octobre 2003 – n°610)

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Daniel Gluckstein sur France 3 : "Vous savez ce qu'est ce document ?"

Lors de l'émission « Piques et polémiques », sur France 3 Ile-de-France, le dimanche 5 octobre, le secrétaire national du Parti des travailleurs, Daniel Gluckstein, a interpellé tous les responsables politiques présents sur le plateau au sujet de la Charte européenne des droits fondamentaux intégrés dans le projet de « Constitution » européenne actuellement discuté par les gouvernements.
« Vous savez ce qu'est ce document? (Daniel Gluckstein brandit dans sa main droite le Code du travail.) Cela s'appelle le Code du travail. Tous les délégués syndicaux, dans notre pays, le connaissent, parce qu'il consigne les droits ouvriers.
Vous savez ce qu'est ce document? (Il lève sa main gauche et montre un document ridiculement petit : la Charte européenne des droits fondamentaux.) Ce qu'on veut faire avec la « Constitution européenne », c'est remplacer le Code du travail (ici), par cette charte européenne (là). Et on veut remettre en cause le Code de la Sécurité sociale, les droits ouvriers, les services publics. »
(semaine du 8 au 14 octobre 2003 – n°610)

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PROJET DE "CONSTITUTION" EUROPÉENNE

Dans la "Charte des droits fondamentaux", dix directives destructrices des droits

La Charte des droits fondamentaux, proclamée en décembre 2000 au sommet de Nice, constitue la partie Il du projet de Constitution européenne élaborée par la Convention présidée par Giscard. Son intégration dans ce projet de Constitution est la première raison qui a amené la CES à y voir « un remarquable pas en avant ». Il semble nécessaire d'apporter une précision capitale sur cette charte.
La Charte des droits fondamentaux se présente sous la forme de 52 articles au langage délibérément flou : « Droit de négociation, droit à des conditions de travail respectant la santé et la sécurité, interdiction du travail des enfants... »
Bien sûr, aucune de ces formulations ne s'appuie sur la préservation et "la garantie du respect des articles précis des Codes du travail existant dans chaque pays. Mais elle ne dit pas non plus .explicitement le contraire.
Mais la Convention de Giscard a fait un ajout à la charte. Le député UMP Pierre Lequiller, membre de la Convention et auteur d'un rapport d'information, indique : « La Convention a explicitement mentionné, dans le préambule de la charte, que les commentaires du présidium de la Convention chargé d'élaborer la charte (rédigée en 2000 - NDLR) lieront les juridictions nationales et communautaires dans leur interprétation des dispositions de ce texte. » Ces commentaires auront donc maintenant une valeur juridique.
Il y a donc la Charte des droits fondamentaux avec de grandes formules abstraites, et il y a les précisions concrètes ayant maintenant valeur juridique constitutionnelle.
LE TRAVAIL DES ENFANTS AUTORISÉ EN STAGE DÈS L'ÂGE DE 13 ANS
Informations ouvrières de la semaine dernière a montré que, pour deux des articles de cette charte, les commentaires juridiques s'appuyaient explicitement sur deux directives européennes sur les licenciements et l'aménagement du temps de travail, qui remettent en cause les droits nationaux arrachés par la lutte de classe.
Mais il y a huit autres directives européennes, et non des moindres, qui sont citées comme la base juridique de la Charte des droits fondamentaux :
- La directive 76/207/CEE relative à l'égalité entre hommes et femmes, celle au nom de laquelle l'Europe a imposé le rétablissement du travail de nuit des femmes dans l'industrie.
- La directive 98/59/CE sur les licenciements collectifs (du même type que celle citée la semaine dernière dans le journal).
- La directive 94/45/CE sur les comités d'entreprise européens, qui impose aux délégués qui y siègent la confidentialité sur les plans de licenciements et remet en cause la souveraineté des organisations syndicales nationales.
- La directive 80/987/CEE sur la protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'entreprise, qui complète celle citée la semaine dernière dans le journal.
- La directive 89/391/CEE sur la santé au travail, qui remet en cause la responsabilité a priori de l'employeur en cas d'accident du travail.
- La directive 94/33/CE sur la protection des jeunes au travail, qui est en fait celle qui a autorisé, au nom de « dérogations », le travail des enfants en stage dès l'âge de 13 ans.
- La directive 92/85/CEE sur les femmes enceintes, qui, transposée ensuite, a remis en cause l'interdiction absolue du licenciement des femmes pendant leurs congés de maternité.
- La directive 96/34/CE sur le congé parental, qui a préparé la disposition de la loi Fillon sur les retraites remettant en cause les bonifications d'années entières de cotisation par enfant pour les femmes.
Qui, parmi les défenseurs de cette Charte des droits fondamentaux, vous a informé à ce sujet?
Informations ouvrières étudiera toutes ces directives européennes, ainsi que d'autres aspects des commentaires du présidium, afin de dévoiler la mystification de cette Charte des droits fondamentaux.
DANIEL SHAPIRA     (semaine du 15 au 21 octobre - n°611)

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