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La CES dit oui à la future Constitution européenne

Le comité exécutif de la Confédération européenne des syndicats (CES) a adopté les 9 et 10 octobre derniers une contribution à la Convention européenne présidée par Giscard, intitulée : "Un traité constitutionnel pour une Europe sociale et des citoyens."
Dès l'introduction du document, le ton est donné : « La CES souscrit à la nécessité et à l'objectif d'adopter désormais un "traité constitutionnel européen" (qui serait un jalon historique sur la voie d'une authentique "Constitution"). »
Or le principe même de l'élaboration d'une Constitution européenne est un pas majeur dans la destruction de toute souveraineté nationale et de tous droits nationaux.
Et sur quelle ligne, cette Constitution européenne? Pour la CES, « un aspect primordial a trait au rôle renforcé que doivent jouer les partenaires sociaux et de prévoir dans le "traité constitutionnel européen" un système européen de relations industrielles ».
Que cache cette formule?
Plus loin, la CES revendique une "gouvernance économique européenne", avec cette précision majeure : "Le but devrait être d'établir un cadre auquel tous les États membres participeraient, et dans lequel les partenaires sociaux joueraient un rôle institutionnalisé."
Les organisations syndicales nationales dont la CES revendique le monopole de la représentation devraient ainsi désormais être juridiquement un rouage des institutions de l'Union européenne ?
Ce serait faire disparaître ce qui a toujours fondé la base des organisations syndicales, à savoir la défense des intérêts distincts des salariés face aux gouvernements et au patronat.
Et sur quelle ligne, ce rôle institutionnalisé ? La CES n'a pas peur d'exiger "de garantir que l'objectif de l'équilibre budgétaire soit établi, que les dépenses d'investissements ne conduisent pas à un déficit".
C'est, en clair, l'alignement total sur les critères de Maastricht et les coupes dans tous les budgets des services publics!
Peut–on encore prétendre honnêtement parler d'une organisation syndicale à propos de la CES?
D. SHAPIRA     (semaine du 11 au 17 décembre 2002 – n°568)

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DES DIZAINES DE MILLIERS D'EMPLOIS MENACÉS DANS LA SIDÉRURGIE

Une bien curieuse manifestation

Le 25 avril, les sidérurgistes de France, d'Allemagne, de Belgique et d'Espagne étaient appelés à manifester à Luxembourg, au siège d'Arcelor, par la fédération européenne de la métallurgie, qui est une branche de la Confédération européenne des syndicats (CES).
Dans le tract d'appel, on peut lire que le but de cette manifestation est de « connaître la stratégie globale du groupe Arcelor ».
C'est une bien curieuse revendication, dans la mesure où les plans ont déjà été rendu publics. On lit dans le journal La Voix du Luxembourg :
« Le 24 Janvier, Arcelor avait annoncé un plan de restructuration prévoyant la fermeture de six hauts–fourneaux en Europe d'ici 2010. Les sites concernés sont Liège, Florange en France, ainsi que Eisenhüttenstadt et Brême en Allemagne. »

D'ailleurs, le 12 mars, la grève était totale à Liège, et 50 000 travailleurs manifestaient, avec les syndicats FGTB et CSC, contre la liquidation de 10 000 emplois dans le bassin de Liège et pour le maintien d'une sidérurgie intégrée (c'est–à–dire avec les hauts–fourneaux en activité).
Les plans de liquidation sont donc bien connus. Alors, poursuivons la lecture du tract de la CES. On lit qu'il s'agit « d'instaurer un bon dialogue social pour permettre d'anticiper les restructurations ». Qu'est–ce que, pour la CES, un « bon dialogue social » ?
EST–CE LE RÔLE DES SYNDICATS DE PRENDRE EN CHARGE LE CALENDRIER DES FERMETURES?
Le quotidien La Voix du Luxembourg indique :
« La veille de la manifestation, les métallurgistes de Cockeril–Sambre qui travaillent dans la phase à chaud ont obtenu un sursis supplémentaire. Le projet d'arrêt progressif des hauts–fourneaux liégeois a été revu par la direction d'Arcelor en négociation avec les syndicats belges. Un premier haut–fourneau sera fermé le 1er Juillet 2005. Et le second en 2009. »

Si l'on comprend bien le scénario : le plan de restructuration est rendu public le 24 janvier, qui prévoit la fermeture de six hauts–fourneaux, dont deux en Belgique, d'ici à 2010 ; le 12 mars, à Liège, 50 000 travailleurs manifestent avec les syndicats pour le maintien en activité des hauts–fourneaux; le 24 avril, les dates de fermeture sont fixées pour 2005 et 2009 ; le 25 avril, la CES appelle à manifester « pour permettre d'anticiper les restructurations ». Mesure qui, comme on l'a vu, a été mise en place la veille.
On peut donc s'interroger: est–ce le rôle des syndicats que de prendre en charge la mise en œuvre du calendrier des fermetures, comme le fait la CES? L'« euromanifestation » du 25 avril n'a–t–elle pas servi en réalité à couvrir cette opération?
Alors, plus que jamais, l'interdiction des licenciements et le maintien en activité des six hauts–fourneaux constituent le socle pour aider à l'unité des sidérurgistes avec leurs organisations syndicales, et certainement pas avec cette bien curieuse organisation qu'est la CES.
ALBERT DAL POZZOLO     (semaine du 7 au 13 mai 2003 – n°588)

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La Confédération européenne des syndicats au service de l'Union européenne

INTERVIEW
Le congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES) se tient à Prague du 26 au 29 mai. Aucun militant et adhérent des confédérations syndicales n'a eu connaissance du document préparatoire. Informations ouvrières se l'est procuré. Jean–Charles Marquiset, l'un des initiateurs de l'appel « La CGT n'est–elle pas en danger? », nous livre ses premières impressions.
Tu as lu le document. D'après toi, que devrait–il sortir de ce congrès?
Déjà, l'ordre du jour peut faire sursauter, puisque Romano Prodi, dès l'ouverture de ce congrès, prononcera un discours en tant que président de l'Union européenne, avant le secrétaire général de la CES!
Dès le mardi, ce sera un invité d'honneur bien connu dans notre pays, puisqu'il s'agit de Valéry Giscard d'Estaing, président de la Convention européenne, qui viendra présenter le projet de « Constitution européenne », qui vise à liquider tous les droits arrachés par les peuples et les travailleurs, et inscrits dans le cadre juridique de chacune des nations européennes.
Preuve, s'il en fallait, que la CES n'a rien d'une confédération syndicale, mais est bien un outil de l'Union européenne.
Tu affirmes que la CES est un outil intégré de l'Union européenne. Peux–tu nous donner des exemples concrets?
Soyons clairs. La CES a soutenu le traité de Maastricht, la mise en place de la monnaie unique, et se bat pour toutes les « stratégies » de l'Union européenne et du patronat, concernant notamment l'emploi.
Dans le document qu'elle veut faire adopter par les confédérations de chaque pays lors de son congrès, il est écrit :
« Défendre la stratégie du sommet de Lisbonne (…). Les syndicats doivent s'impliquer dans le processus des réformes, la formation et l'apprentissage tout au long de sa vie. »
Au moment où les travailleurs, dans notre pays et dans de nombreux autres, combattent les contre–réformes impulsées par les gouvernements et le patronat, la CES voudrait que les confédérations, dans chaque pays, participent à ces contre–réformes.
Elle ne s'arrête pas là, puisque, concernant les élections européennes de 2004, elle veut faire voter lors de ce congrès le concept suivant :
« Accroître la participation aux élections européennes de 2004, afin que les élus bénéficient d'un soutien populaire. » Et, dans le même temps, elle propose de « promouvoir les services d'intérêt général » et de « revendiquer une réglementation démocratique des services publics libéralisés, avec implication des syndicats et des autres parties concernées ».
N'oublions pas que cette directive, corédigée par le patronat et la CES elle–même, doit permettre l'ouverture à la concurrence de tous les secteurs et services publics, c'est–à–dire à la privatisation massive.
Peux–tu nous donner quelques autres grandes lignes de ce projet?
Certes. Il y en a qui ne nécessitent même pas de commentaires.
« Soutenir le pacte de stabilité (…). Promouvoir la création, auprès de la Banque centrale européenne, d'un comité consultatif composé des partenaires sociaux (…). La participation des syndicats dans les restructurations, y compris les fusions–acquisitions (…). »
D'ailleurs, pour la CES, « les partenaires sociaux doivent devenir des corégulateurs au niveau européen ».
Mais que dit la CES, dans ce document, sur la question des retraites?
Elle propose « de sauvegarder les systèmes de pension légale comme majeure partie des droits de pension et de défendre le cadre juridique de l'Union européenne pour la mise en place de fonds pension (…). Privilégier des formules permettant un passage progressif de la vie professionnelle à la retraite sur une base volontaire, tout en luttant contre l'exclusion des travailleurs âgés du marché du travail. »
Les choses sont donc claires. Il s'agit du soutien inconditionnel aux décisions du sommet de Barcelone, qui allonge de cinq ans le nombre d'annuités, document signé par Jospin et Chirac à cette occasion.
C'est l'inverse de ce que réclament les travailleurs dans la rue, dans notre pays. Alors, les confédérations syndicales vont–elles voter à Prague contre le mandat des travailleurs et de l'immense majorité des syndiqués?
Alors, pour toi, la CES n'est pas un syndicat?
Non. Cette organisation ne vise qu'à intégrer les syndicats à des objectifs destructeurs. Elle propose un rapprochement du capital et du travail. Elle propose de s'intégrer dans tous les forums avec les ONG, les gouvernements, les institutions internationales…
Comme si le rôle des syndicats était celui–là : « La CES doit intensifier son engagement avec les groupes de la société civile au sein du Forum social mondial et du Forum européen. »
Enfin, la CES propose l'introduction « d'une carte CES pour chaque adhérent des confédérations nationales travaillant à l'étranger », cela afin de créer une « identité ».
Moi, mon identité, je l'ai depuis 1976. Je suis à la CGT depuis cette date, et la seule carte syndicale que je veux garder est celle–là, et non celle de la CES.
(semaine du 21 au 27 mai 2003 – n°590)

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10e CONGRÈS DE LA CES À PRAGUE, 26 AU 29 MAI

Un congrès placé sous l'égide de Giscard et de Delors

PRÉSENTATION
L'impression majeure qui ressort de ce congrès est celle d'une immense contradiction. Contradiction entre les grèves et manifestations qui secouent l'Europe ces dernières semaines, et notamment en France, en Autriche, en Allemagne, et le caractère des débats pendant ces quatre jours, culminant dans l'ovation du congrès, presque entièrement debout, pour saluer Jacques Delors.
Delors, l'ancien président de la Commission européenne, l'homme du traité de Maastricht et de l'ouverture à la privatisation de tous les services publics, vedette incontestée à l'applaudimètre…
Voilà qui résume ce congrès de la CES.
Cela ne signifie certes pas que le souffle des mouvements en cours en Europe ne se soit pas du tout fait sentir. Les représentants du DGB (centrale syndicale allemande) ont soumis une « proposition d'initiative » demandant un « réexamen du pacte de stabilité », motion d'urgence qui, bien que majoritaire, n'a pas été considérée comme adoptée, car n'ayant pas obtenu les deux tiers des voix nécessaires.
Cette motion valait d'ailleurs plus par les considérants oraux de sa présentation par un orateur du DGB que par son strict contenu :
« Il y a eu de grandes manifestations en France, en Italie, en Autriche, en Allemagne. Les gouvernements n'ont pas apporté de réponse de type social à cette crise. Non à la détérioration des acquis sociaux, oui à une politique économique cherchant à sortir l'Union européenne de la crise. »
Mais pour le reste, tous les amendements au document principal adopté par le congrès, intitulé « Programme d'action », qui cherchaient à sortir un tant soit peu du cadre institutionnel de l'Europe ont été rejetés, confirmant ainsi que l'ovation faite à Jacques Delors n'était pas le fruit du hasard, mais bien le concentré de la nature de la CES.
DANIEL SHAPIRA     (semaine du 4 au 10 juin 2003 – n°592)

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LES REMERCIEMENTS DE GISCARD À LA CES

Ou comment la CES a participé à l'élaboration de la future Constitution européenne

Mardi 27 mai, Giscard, président de la Convention en charge d'élaborer la future Constitution européenne, s'est exprimé longuement devant le congrès de la CES. On mesurera dans les extraits ci–dessous du discours de Giscard, représentant du grand capital, à quel point la CES s'est intégrée dans la corédaction de cette Constitution :
« J'ai pu mesurer tout l'engagement qui est le vôtre dans le débat au sein de la Convention, non seulement par les nombreuses contributions que vous avez adressées à la Convention, mais également par l'excellente participation et l'engagement dont fait preuve votre représentant au sein de la Convention, M. Emilio Gabaglio, depuis le début de nos travaux.
Les partenaires sociaux, CES et UNICE, ont montré en effet, tant au cours e nos sessions pléni&egrve;res que dans les groupes de travail auxquels ils ont participé, combien les partenaires sociaux constituent une composante essentielle de la mécanique de l'Union (…).
La Convention, c'est l'originalité et la richesse de sa démarche, réunit représentants des gouvernements, parlementaires européens, parlementaires nationaux, membres de la Commission européenne, du Comité économique et social, et du Comité des régions, et, last but not least, représentants des partenaires sociaux (…)
"E VOUS REMERCIE DE VOTRE AIDE À LA RÉALISATION D'UNE CONSTITUTION POUR L'EUROPE"
La méthode de la Convention est celle de l'ouveture (…), ouverture sur la société civile, puisque plusieurs sessions de nos travaux ont été consacrées à écouter ce que les associations, les organisations représentatives, attendent de l'Europe (…).
La CES constitue un des relais forts avec la société civile et je salue ici le rôle important qu'il a joué au sein du "groupe de contact de la société civile" constitué au sein de la Convention (…).
La Charte des droits fondamentaux deviendra partie intégrante de notre traité (…).
Autre innovation, un titre de notre Constitution portera exclusivement sur la vie démocratique. Il organisera notamment la consultation de la société civile, sous toutes ses composantes, et devrait consacrer le rôle des partenaires sociaux et l'importance du dialogue social autonome (…).
Enfin, parmi vos priorités, figure le maintien dans la Constitution du rôle des partenaires sociaux. La Convention a confirmé que la Constitution devait reconnaître leur rôle explicitement et que des dispositions adéquates en matière de consultation devaient y être incluses, tout en maintenant les dispositions existantes relatives à la négociation des accords sociaux (…).
Je vous remercie de vos efforts déployés en ce sens e de votre aide à la r&eaute;alisation d'une Constitution démocratique moderne et sociale, pour les Européens et pour l'Europe! »
Quel hommage à la corédaction par la CES de la future Constitution européenne!
Et corédaction de quoi? D'une Constitution qui vise à aller jusqu'au bout dans la remise en cause de tout le cadre national dans lequel la classe ouvrière a arraché ses conquêtes sociales, qu'elle cherche à préserver. Corédaction d'une Constitution qui, en préconisant notamment les Services d'intérêt général (SIG), pousse à la privatisation de tous les services publics.

Nous y reviendrons la semaine prochaine.
(semaine du 4 au 10 juin 2003 - n°592)

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LA CES VUE PAR ELLE–MÊME

DOCUMENTS
La veille de son congrès, Emilio Gabaglio, secrétaire général, a publié un livre intitulé : Qu'est–ce que la CES?
On y trouve notamment ce passage savoureux :
« À la différence des syndicats nationaux, l'évolution de la CES ne relève pas de la lutte des classes, mais de l'institutionnalisation de la politique européenne. »
On ne saurait mieux dire, et c'est un connaisseur qui parle, secrétaire général de la CES pendant douze ans, de 1991 à 2003.


LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX : UNE RÉGRESSION PAR RAPPORT AUX CONVENTIONS DE L'OIT
La « revendication » principale de la CES est que la Charte des droits fondamentaux adoptée au sommet de Nice, en décembre 2000, sous la présidence conjointe de Chirac et Jospin, soit intégrée dans la future Constitution européenne.
Là encore, le petit livre Qu'est–ce que la CES? est un aveu. On y lit, à propos de cette charte, dans une note de bas de page :
« Le texte adopté contient trois types de dispositions. Les articles concernant les droits de la personne et les libertés fondamentales, qui reprennent pour l'essentiel la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH) du Conseil de l'Europe, les articles sur les droits civils et politiques, ceux qui concernent les droits économiques et sociaux.
En matière sociale, les régressions sont très nettes par raport à plusieurs législations nationales, à la Charte sociale du Conseil de l'Europe et à plusieurs conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT).
Ainsi, le droit à la protection sociale est réduit à un "droit d'accès aux prestations de Sécurité sociale et aux services sociaux", le droit au travail au "droit de travailler" et à celui "d'accéder à un service gratuit de placement", le droit au logement à celui de percevoir une aide pour se loger…
Les droits des salariés font l'objet de dispositions vagues ne fournissant aucune garantie (droits syndicaux, négociations collectives, consultation des employés, santé…).
M. Emilio Gabaglio a dû se battre pendant des semaines pour faire intégrer in extremis le droit de grève. La libre circulation des biens et des capitaux, est, en revanche, rappelée dans le préambule. »

(semaine du 4 au 10 juin 2003 – n°592)

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AU LENDEMAIN DU CONGRÈS DE PRAGUE DE LA CES

Les véritables positions de la CES

ANALYSE
Nous avons abordé la semaine dernière quelques aspects du déroulement du congrès de la Confédération européenne des syndicats (CES), qui s'est tenu à Prague du 26 au 29 mai.
Nous y revenons cette semaIne à travers quelques morceaux choisis d'un petit livre intitulé Qu'est–ce que la CES? Et publié sous la responsabilité d'Emilio Gabaglio (secrétaire général de la CES pendant douze ans, de 1991 à 2003) à la veille de l'ouverture du congrès.
Les retraites? Citons : « Il faut adapter les régimes de protection sociale aux nouvelles formes de travail, à l'évolution des structures familiales et au vieillissement démographique. Les droits à la protection sociale doivent être des droits individuels. »
Il s'agit là très exactement des arguments de la Commission européenne et des gouvernements pour justifier l'allongement de la durée de cotisation. Et cela ne s'arrête pas là : « La défense de la pérennité des régimes de pension publics, reposant sur la solidarité entre les générations et financés par répartition, reste notre priorité absolue. En raison du vieillissement démographique, les États membres doivent se préparer à une hausse des coûts des pensions. Il faut constituer des réserves pour soutenir les régimes statutaires à long terme. Les fonds de pension professionnels ne peuvent constituer qu'un second régime de pensions. »
Donc la CES accepte les fonds de pension… et, par là même, la liquidation des retraites par répartition.
La flexibilité? L'aveu : « La CES est attachée au plein emploi, car le travail est un droit. Néanmoins, elle est consciente que le sens de l'expression "plein emploi" a évolué. Elle ne signifie plus et ne peut plus signifier que la moitié de la population – plutôt masculine – est assurée d'un emploi à vie chez le même employeur.
Une conception moderne du plein emploi prend en compte des changements d'employeur, ainsi que des sorties et des retours sur le marché du travail. Cette position nous vaut d'être accusés de consentir à la flexibilité. Cette critique n'a pas de sens. La flexibilité à laquelle nous consentons est une flexibilité négociée. »
Peut–on être plus clair?
Les privatisations : « La CES a toujours défendu le principe que lorsqu'on ouvrait des marchés, il faut que cela se fasse d'une manière contrôlée et durable avec une régulation démocratique de ces secteurs. Vis–à–vis de la propriété publique ou privée des services, nous adoptons une position de neutralité. »
Neutralité? Donc pour la CES, tous les services publics peuvent être privatisés. On appellera cela services d'intérêt général (SIG). Mais la CES met une "condition" : « Il faut absolument éviter qu'un monopole public – contrôlé soit simplement remplacé par un monopole privé – non contrôlé. »
Mais, si le monopole privé est prétendument « contrôlé », alors là, pour la CES, pas de problème. Il suffit de voir ce qui s'est passé avec la privatisation de France Télécom, qui a été accompagnée de la mise en place d'une « Autorité de régulation des télécommunications » (ART). La privatisation a donc été « contrôlée », comme le demande la CES. Mais cela n'a empêché ni l'effondrement en Bourse, ni les milliers de suppressions d'emplois.
Voilà les véritables positions de la CES.
DANIEL SHAPIRA     (semaine du 11 au 17juin 2003 – n°593)

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Sécurité sociale, retraite : la CES "favorable à la démarche de la Commission européenne"

ANALYSE

L'organisme qui prétend représenter les syndicats au niveau européen s'appelle la Confédération européenne des syndicats (CES). A quelques jours d'une manifestation européenne appelée par elle, le 4 octobre, elle vient de signer avec le patronat européen une « position commune des partenaires sociaux européens sur la communication de la, commission sur la rationalisation de la coordination ouverte clans le domaine de la Sécurité sociale ».
Dans une « lettre commune » avec les organisations patronales européennes adressée à la Commission européenne, datée du 16 septembre, la CES écrit que « les partenaires sociaux sont favorables à la démarche de rationalisation telle que proposée par la Commission européenne, qui a pour objectif de conforter la dimension économique et sociale de la stratégie de Lisbonne ».
Précisons... La « stratégie de Lisbonne », adoptée en 2000 sur proposition de la Commission européenne par les gouvernements réunis lors d'un Conseil européen, a, entre autres, décidé « d'accélérer la libéralisation dans les secteurs tels que le gaz, l'électricité, les transports et les services postaux ». La CES dit donc elle-même qu'elle y est favorable.
"UN REMARQUABLE PAS EN AVANT"
La « lettre commune» poursuit : « Ils (les "partenaires sociaux") soutiennent aussi la synchronisation proposée des calendriers des processus de coordination pour l'emploi, la protection sociale et la politique économique » . Concernant la retraite, rappelons que ce « calendrier » exige d'augmenter de cinq ans l'âge de départ à la retraite : « Il faudrait chercher d'ici 2010 à augmenter progressivement d'environ cinq ans l'âge moyen effectif auquel cesse, dans l'Union européenne, l'activité professionnelle », a-t-il été en effet décidé au Conseil européen de Barcelone (mars 2002).
Ce programme de destruction sociale de l'Union européenne, la CES le revendique donc totalement, et elle le revendique même en commun avec les patrons!
La manifestation européenne qu'elle organise à, Rome, le 4 octobre, n'a qu'un but : tenter d'entraîner les organisations syndicales nationales dans l'accompagnement de ce démontage de toutes les législations nationales.
Un projet de « Constitution européenne» va être discuté par une conférence intergouvernementale (CIG), à Rome, à partir du 4 octobre. La CES y voit « un remarquable pas en avant » et annonce même qu'elle « s'opposerait vigoureusement à toute tentative de (le) remettre en question » (1).
Ce projet de « Constitution européenne » rend caduque toute Constitution nationale en déclarant les « lois européennes » « directement applicables et obligatoires dans tous leurs éléments », et la CES s'en félicite, notamment parce qu'il inclut « la reconnaissance du rôle des partenaires sociaux et de leur dialogue social ».
On a vu, dans la « lettre commune » citée au début de cet article, ce que la CES entendait par là... Comment dès lors considérer que la CES puisse ressembler, même de loin, à une organisation syndicale ?
V.L.    (semaine du 24 au 30 septembre 2003 - n°608)
(1) Mémorandum de la CES à la présidence italienne de l'Union européenne, juillet 2003.

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ATTAC appelle à manifester avec la CES

ATTAC est les principal organisateur du Forum social européen (Paris, novembre 2003), qu'elle prépare avec la CES, institution de l'Union européenne. Cet appel d'ATTAC à soutenir « l'euromanifestation » du 4 octobre, à l'initiative de la CES, n'éclaire-t-il pas la véritable orientation du forum social européen lui-même, qui s'ouvrira un mois plus tard?
« La Confédération européenne des syndicats appelle à une grande manifestation le 4 octobre prochain à Rome à l'occasion de l'ouverture de la conférence intergouvernementale.
Il s'agit de revendiquer une Europe sociale et démocratique, c'est-à-dire le plein emploi et des emplois de qualité, des retraites solidaires et viables, des droits nouveaux pour les salariés, leur permettant de se défendre contre les décisions unilatérales et purement financières du patronat.
Cet appel a lieu au moment où ATTAC travaille à analyser le projet de traité constitutionnel et à formuler des propositions alternatives.
ATTAC, dont l'objet est la lutte contre la mondialisation libérale, partage pleinement les objectifs des organisations syndicales de mettre au coeur du traité constitutuionnel les droits sociaux et des droits démocratiques de hauts niveaux.
C'est pourquoi ATTAc souhaite le plein succès de l'euromanifestation du 4 octobre.
Le bureau d'ATTAC, Fait à Paris le 9 septembre 2003 »
(semaine du 24 au 30 septembre 2003 - n°608)

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Pour la CES, la "Constitution européenne" est un "remarquable pas en avant" !

Au moment de l'ouverture de la conférence intergouvernementale à Rome, le 4 octobre, il y a eu deux manifestations : l'une, appelée par la prétendue « Confédération européenne des syndicats » (CES), ouvertement favorable au projet de « Constitution européenne », l'autre, par les organisations se réclamant de « l'altermondialisation », qui préparent un Forum social européen qui aura lieu le mois prochain, à Paris. Ces deux manifestations étaient « convergentes », « imbriquées », ont répété les altermondialistes.
Le secrétaire général de la CES, dans un discours au cours de sa manifestation, a tenu à se présenter comme le défenseur intransigeant du projet de « Constitution » européenne :
« Aujourd'hui, nous manifestons pour l'avenir, un avenir où l'Europe sociale sera un phare pour le monde (...). La nouvelle Constitution pour l'Europe doit refléter ces valeurs. C'est le cas du projet rédigé par la Convention. J'adresse le message suivant aux dirigeants des États-nations alliés aux forces sombres du conservatisme : bas les pattes devant ce projet! »
C'était une confirmation du mémorandum qu'il avait déposé le 18 septembre lors d'une entrevue auprès du président du Conseil italien, Silvio Berlusconi :
« Aux yeux de la CES, lit-on dans ce texte, la Convention européenne a présenté un avant projet de traité constitutionnel, qui, dans le contexte politique actuel, représente un remarquable pas en avant vers une Union européenne plus efficace, plus démocratique et, dans une certaine mesure, plus proche des préoccupations et aspirations des citoyens et citoyennes. »
UNE ORGANISATION QUI A USURPÉ LE NOM DE SYNDICAT
« L'Europe a besoin d'une gouvernance économique renforcée, fondée sur l'application intelligente des dispositions du traité actuel. » Autrement dit, la CES demande que le traité de Maastricht, qui permet à la Commission européenne de privatiser, de déréglementer, de détruire les nations avec l'arme de la régionalisation et de l'euro, soit appliqué intelligemment. La « présidence italienne », en l'occurrence Silvio Berlusconi, a répondu à ce souhait en décidant, le 29 septembre, d'augmenter de cinq le nombre d'années de cotisation nécessaires pour que les travailleurs italiens puissent partir à la retraite, passant ainsi de 35 à 40 annuités. Il applique « intelligemment » les décisions du sommet européen de Barcelone de mars 2002. Voilà où mène l'acceptation du traité de Maastricht!
Dans les « Dix tests sociaux pour la présidence italienne », qui constituent l'essentiel du mémorandum de la CES, on lit: « Service d'intérêt général (SIG) : établir un fondement juridique dans les traités, entamer une procédure en vue d'une directive-cadre » Mais que sont ces SIG?
Ce terme a été inventé par la Commission européenne pour se substituer aux services publics.
La Commission européenne vient de publier un Livre vert où elle explique en effet :
« Le fait que les fournisseurs de services d'intérêt général soient publics ou privés n'a pas d'importance dans le droit communautaire (...). Les entreprises publiques confient de plus en plus souvent la fourniture de ces services à des entreprises publiques ou privées, ou à des partenariats entre le secteur public et le secteur privé. »
Autrement dit, c'est le moyen de privatiser tous les services publics. Et il faudrait dire, avec la CES, vive la Constitution européenne? Ce n'est pas étonnant de la part d'une organisation qui a usurpé le nom de « syndicat » et qui n'est rien d'autre qu'un rouage de l'Union européenne.
Il faut le dire clairement : c'est sur ce programme que la CES appelait tous les syndicats d'Europe à manifester, ce 4 octobre.
ALBERT DAL POZZOLO    (semaine du 8 au 14 octobre - n°610)

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Les altermondialistes main dans la main avec la CES

Les altermondialistes ont également manifesté à Rome le 4 octobre. Ils l'ont fait, non en opposition à celle de la CES, mais en totale collaboration avec elle, se réclamant ouvertement d'objectifs « convergents ».
Fausto Bertinotti, le secrétaire général du Parti de la refondation communiste (né de l'éclatement du Parti communiste italien, et à la direction duquel siègent les amis d'Alain Krivine et d'Olivier Besancenot), est radieux : « Ces deux manifestations vont comme deux grands fleuves qui convergent vers la mer de la construction d'une autre Europe. » Tom Benetollo, président national de l'ARCI, une association luttant contre la guerre et le libéralisme, déclarait : « ces deux initiatives s'imbriquent non seulement par leurs thèmes, mais aussi par leurs revendications. »
Le 3 octobre, ils tenaient à l'université de Rome un Forum social. Parmi les participants, on trouvait : Joël Dacaillon, secrétaire de la CES et dirigent de la CGT en France, des responsables de la CGIL italienne, Francis Wurtz, dirigeant du PCF et président du groupe de la Gauche unie (GUE) au Parlement européen, Sophie Zapharie, pour le groupe de travail préparant le Forum social européen de Saint-Denis, Fausto Bertinotti, secrétaire général du Parti de la refondation communiste.
Au cours de ce Forum était adopté le mot d'orde inscrit en tête de la manifestation : « L'Europe, c'est nous ! » Fausto Bertinotti expliquait : « Dans la phase d'élaboration de la Constitution européenne, il y a 400 millions de personnes qui doivent en être les protagonistes. Les altermondialistes ont bien appréhendé le sens historique de l'opération et ont décidé d'entrer dans l'arène constituante parce que ce sont eux – les mouvements sociaux, les pacifistes, les immigrés, le femmes – qui constituent l'Europe. »
Il apparaît ainsi clairement que le mouvement altermondialiste, qui prépare le Forum social européen en France à Saint-Denis à la mi-novembre, s'intègre ans le processus d'élaboration de la « Constitution européenne » initié par la CES.
(semaine du 8 au 14 octobre - n°610)

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